La France, l’Égypte et le Maroc refusent de laisser mourir l’UPM

Elle vient de bénéficier de sa première grande levée de fonds
Le report à novembre prochain du Sommet de l’Union pour la Méditerranée (UPM) en raison du conflit palestino-israélien ne signifie pas que l’avenir de l’initiative lancée, il y a près de deux années par le président Sarkozy, est hypothéqué.
Marseille (France)

De notre envoyé spécial
La France, l’Italie, le Maroc, l’Egypte et la Jordanie continuent en tout cas d’y croire et se refusent à se laisser gagner par le défaitisme. Les responsables de ces pays – qui constituent actuellement le noyau dur du projet – se montrent persuadés que l’UPM résistera aux chocs et aux innombrables tensions politiques qui minent la Méditerranée. C’est l’essentiel du message que sont venus délivrer, jeudi au Palais de la Bourse à Marseille, Christine Lagarde, Anne-Marie Idrac et Henri Guaino, respectivement ministre française de l’Economie, secrétaire d’Etat française au Commerce extérieur et conseiller spécial du président Sarkozy, à l’ouverture du « for’UM », un événement organisé par la coprésidence franco-égyptienne de l’UPM destiné à présenter un bilan des réalisations de l’organisation et à mobiliser les milieux d’affaires autour de projets concrets.
Près de 600 porteurs de projets et financeurs ont participé à cette rencontre marquée par la présence, entre autres, du secrétaire général de l’UPM, le Jordanien Ahmed Massadeh, du ministre égyptien du Commerce et de l’Industrie, Rachid Mohamed Rachid, et du Commissaire européen à l’élargissement et à la politique de voisinage, Stefan Fule. Au cours de leur plaidoyer, les responsables français se sont même refusées à parler de panne. Selon eux, l’Union pour la Méditerranée « avance ». Mieux, elle commence à prendre des couleurs et dispose désormais de moyens financiers suffisants pour aller loin.
A deux semaines de la fin de la coprésidence franco-égyptienne de l’UPM, ils ont tenu à montrer, chiffres à l’appui, que les liens se resserrent entre les deux rives de la Méditerranée et que les problèmes politiques ne bloquent pas la construction de l’UPM tout comme ils n’empêchent pas l’activité économique. « On ne mobilise pas 400 millions d’euros et on ne lance pas 270 projets pour une initiative en panne ! Les difficultés politiques n’ont pas empêché l’activité économique d’avancer, même si on ne fait pas de grandes annonces médiatiques. L’UPM est une initiative extrêmement positive même si ici ou là il y a quelques ralentissements, aujourd’hui les financements sont là », a soutenu Mme Lagarde lors d’un bref point de presse animé en marge « for’UM ». Une manière sans doute de dire que les choses vont maintenant s’accélérer.
L’UPM reprend des couleurs
La ministre française de l’Economie faisait allusion, bien évidemment, à Inframed qui avait été lancé à Paris la veille du « for’UM ». Il s’agit d’un fonds d’investissement destiné à financer des projets de l’Union pour la Méditerranée. Doté dans un premier temps de 385 millions d’euros avec l’objectif d’atteindre un milliard d’ici fin 2011, Inframed est présenté comme « un levier important pour le financement et la mise en œuvre de projets concrets dans la zone méditerranéenne, dans des secteurs relevant des priorités définies par la Déclaration de Paris telles que les infrastructures en matière de transports et l’énergie ». Ce fonds, d’après Mme Lagarde, permettra également de lever des capitaux privés pour financer des projets dans l’ensemble des 43 Etats membres de l’UPM. Inframed a été mis sur pied conjointement par la Caisse des dépôts française (qui contribue à hauteur de 150 millions d’euros), la Cassa Depositi e Prestiti italienne (150 millions d’euros), la Caisse des dépôts et de gestion du Maroc (20 millions d’euros) et l’Egypte (EFG Hermes 15 millions d’euros), ainsi que la Banque européenne d’investissement (qui apportera 50 millions d’euros).
Toujours en matière de financements, la ministre française de l’Economie a rappelé que les pays de l’UPM peuvent aussi bénéficier du soutien de la Fisem (dotée de 250 millions d’euros) qui apporte un appui financier aux entreprises, de l’ARIS (75 millions d’euros), de l’AFD, de la BEI et du Faro. Pour la secrétaire d’Etat au Commerce extérieur, Anne-Marie Idrac, ce « for’UM » est aussi la preuve que « l’UPM n’est pas morte » et que « ça marche ! ». Une position sur laquelle elle fut rejointe par Henri Guaino, conseiller spécial du président Nicolas Sarkozy et chef de la mission interministérielle pour qui l’« Union s’installe effectivement dans la durée, avec le soutien non seulement des Etats mais des sociétés civiles ». En réponse aux critiques nombreuses dont fait encore l’objet son « bébé » (il est l’inspirateur du projet de l’UPM), M. Guaino s’est contenté de rappeler avec amusement que « même l’Union européenne ne s’est pas faite en un jour ».
Dans le même ordre d’idées, le ministre égyptien du Commerce et de l’Industrie, Rachid Mohamed Rachid, a prévenu du « danger qu’il y aurait à laisser le développement de la Méditerranée être pris en otage par la politique et a recommandé aux pays membres de l’UPM d’être davantage pragmatiques ».
Par Zine Cherfaoui
El Watan, 29 mai 2010


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