Le président Abdelaziz Bouteflika et son homologue français, Nicolas Sarkozy, semblent décidés à mettre fin à la brouille qui affecte depuis plus d’un an les relations entre les deux pays.
D’une pierre deux coups ! Le 25e sommet qui s’ouvre aujourd’hui à Nice, dans le sud de la France, semble constituer une opportunité pour la France et l’Algérie de lever les malentendus qui altèrent, depuis plus d’une année, les relations bilatérales. En décidant d’aller, lui-même, à ce sommet, le président Bouteflika fait gage de bonne volonté de renouer, au plus haut niveau, le dialogue avec la France.
Un dialogue rompu depuis le report de sa visite présidentielle en France en juin 2009. « La participation de M. Bouteflika à ce 25e sommet contribuera à améliorer les relations avec la France », a affirmé hier à l’AFP le ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, estimant que « ces relations algéro-françaises, marquées par l’absence de rencontres à haut niveau depuis des mois, doivent être appréciées globalement et non pas seulement à l’aune d’un certain nombre de questions qui reviennent souvent, certes importantes ». Si aucun entretien bilatéral entre les deux chefs d’Etat n’est prévu, « ils se verront et se parleront », affirme-t-on à l’Elysée. Il s’agirait donc d’une rencontre informelle hautement symbolique qui marquerait un début de décrispation des relations entre les deux Etats.
Mais cette reprise de contact entre les deux présidents suffira-t-elle pour mettre fin à une brouille qui persiste depuis des mois ? A l’évidence non, tant les dossiers qui fâchent sont aussi nombreux que complexes. Il y a d’abord la relance par la justice française de l’enquête sur l’assassinat de l’opposant Ali Mecili en 1987 à Paris, avec l’arrestation en août 2008 du diplomate Mohamed Ziane Hasseni. Après de fortes pressions d’Alger, ce dernier bénéficie d’un nouveau statut de témoin assisté. Mais le dossier n’est toujours pas classé. Une autre affaire oubliée ressurgit suscitant également la colère d’Alger : il s’agit de la réouverture du dossier de l’assassinat des sept moines de Tibehirine en 1996, après des « révélations » d’un général français, selon lesquelles ils seraient morts dans une « bavure » de l’armée algérienne. Sans tarder, le parquet diligente une nouvelle enquête. Aussi, l’inscription de l’Algérie par Paris sur une liste de « pays à risque » concernant les transports aériens a été vivement critiquée par Alger. Mais il n’y a pas que cela.
Le soutien de la France au projet marocain de l’autonomie du Sahara occidental, la révision de l’Accord de 1968 donnant un statut privilégié aux Algériens vivant en France et l’insuffisance des investissements directs français en Algérie sont autant de questions qui irritent également Alger. La crise entre les deux pays est également alimentée, voire aggravée par la question de l’histoire et de la mémoire, sujet hautement polémiqué surtout depuis l’adoption par le Parlement français de la loi du 23 février 2005 glorifiant la colonisation. Dans sa déclaration à AFP, Mourad Medelci a d’ailleurs appelé la France à tenir compte des « sentiments patriotiques » qui sont « extrêmement importants ». « Les messages (des) Algériens, quel que soit leur âge, sont simplement des messages de ceux qui (…) ont combattu pour que l’Algérie redevienne leur pays. Qu’on ne leur en veuille pas aujourd’hui de le rappeler aux autres, quand les autres font mine de l’oublier », a-t-il attesté. Côté français, on espère que la présence du président Bouteflika à Nice « permettra peut-être de relancer le dialogue », reconnaissant que les relations entre les deux capitales sont « compliquées ».
« Nous devons éviter l’écueil de la non- reconnaissance de faits longtemps occultés comme ceux du 8 Mai 1945, que deux ambassadeurs de France en Algérie ont qualifiés, en 2005 puis en 2008, de tragédie inexcusable et d’épouvantables massacres », estime une source diplomatique française, à Alger, dans une déclaration rapportée par l’AFP. Mais, souligne-t-on, « la France n’est pas prête psychologiquement à faire acte de repentance et il faut donc trouver une voie médiane ». Ce refus de présenter des excuses à l’Algérie a été clairement exprimé par le président Nicolas Sarkozy à la veille de sa deuxième visite en tant que chef d’Etat en Algérie le 3 décembre 2008. Le nouveau locataire de l’Elysée avait alors exclu toute idée de repentance et souhaité que s’établisse un partenariat concret, débarrassé du poids de l’histoire. « Je ne viens ici ni pour blesser ni pour m’excuser », avait-il déclaré. Rappelant qu’il n’avait « pas fait la guerre d’Algérie », il avait appelé à se « tourner résolument vers l’avenir ».
L’Algérie avait pourtant fait de la reconnaissance par Paris des « crimes » commis pendant la période coloniale une condition de la signature d’un traité d’amitié initié en 2003 par les présidents Chirac et Bouteflika. Destiné à sceller la réconciliation entre la France et l’Algérie, ce traité devait être signé fin 2005. La signature de ce traité a été renvoyée aux calendes grecques à cause de ce refus de Paris de se repentir. Bien que les relations économiques et les échanges continuent, l’Algérie diversifie ses fournisseurs et ses partenaires économiques. Les Chinois sont présents en force en Algérie, raflant des marchés à coups de milliards de dollars. Consciente des risques de voir ses parts de marché se rétrécir, la France, qui souffre d’un lourd déficit économique, montre moins de pathos et plus de pragmatisme. Surtout quand il y a 286 milliards de dollars sur la table.
Algérietele, 31 mai 20101
D’une pierre deux coups ! Le 25e sommet qui s’ouvre aujourd’hui à Nice, dans le sud de la France, semble constituer une opportunité pour la France et l’Algérie de lever les malentendus qui altèrent, depuis plus d’une année, les relations bilatérales. En décidant d’aller, lui-même, à ce sommet, le président Bouteflika fait gage de bonne volonté de renouer, au plus haut niveau, le dialogue avec la France.
Un dialogue rompu depuis le report de sa visite présidentielle en France en juin 2009. « La participation de M. Bouteflika à ce 25e sommet contribuera à améliorer les relations avec la France », a affirmé hier à l’AFP le ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, estimant que « ces relations algéro-françaises, marquées par l’absence de rencontres à haut niveau depuis des mois, doivent être appréciées globalement et non pas seulement à l’aune d’un certain nombre de questions qui reviennent souvent, certes importantes ». Si aucun entretien bilatéral entre les deux chefs d’Etat n’est prévu, « ils se verront et se parleront », affirme-t-on à l’Elysée. Il s’agirait donc d’une rencontre informelle hautement symbolique qui marquerait un début de décrispation des relations entre les deux Etats.
Mais cette reprise de contact entre les deux présidents suffira-t-elle pour mettre fin à une brouille qui persiste depuis des mois ? A l’évidence non, tant les dossiers qui fâchent sont aussi nombreux que complexes. Il y a d’abord la relance par la justice française de l’enquête sur l’assassinat de l’opposant Ali Mecili en 1987 à Paris, avec l’arrestation en août 2008 du diplomate Mohamed Ziane Hasseni. Après de fortes pressions d’Alger, ce dernier bénéficie d’un nouveau statut de témoin assisté. Mais le dossier n’est toujours pas classé. Une autre affaire oubliée ressurgit suscitant également la colère d’Alger : il s’agit de la réouverture du dossier de l’assassinat des sept moines de Tibehirine en 1996, après des « révélations » d’un général français, selon lesquelles ils seraient morts dans une « bavure » de l’armée algérienne. Sans tarder, le parquet diligente une nouvelle enquête. Aussi, l’inscription de l’Algérie par Paris sur une liste de « pays à risque » concernant les transports aériens a été vivement critiquée par Alger. Mais il n’y a pas que cela.
Le soutien de la France au projet marocain de l’autonomie du Sahara occidental, la révision de l’Accord de 1968 donnant un statut privilégié aux Algériens vivant en France et l’insuffisance des investissements directs français en Algérie sont autant de questions qui irritent également Alger. La crise entre les deux pays est également alimentée, voire aggravée par la question de l’histoire et de la mémoire, sujet hautement polémiqué surtout depuis l’adoption par le Parlement français de la loi du 23 février 2005 glorifiant la colonisation. Dans sa déclaration à AFP, Mourad Medelci a d’ailleurs appelé la France à tenir compte des « sentiments patriotiques » qui sont « extrêmement importants ». « Les messages (des) Algériens, quel que soit leur âge, sont simplement des messages de ceux qui (…) ont combattu pour que l’Algérie redevienne leur pays. Qu’on ne leur en veuille pas aujourd’hui de le rappeler aux autres, quand les autres font mine de l’oublier », a-t-il attesté. Côté français, on espère que la présence du président Bouteflika à Nice « permettra peut-être de relancer le dialogue », reconnaissant que les relations entre les deux capitales sont « compliquées ».
« Nous devons éviter l’écueil de la non- reconnaissance de faits longtemps occultés comme ceux du 8 Mai 1945, que deux ambassadeurs de France en Algérie ont qualifiés, en 2005 puis en 2008, de tragédie inexcusable et d’épouvantables massacres », estime une source diplomatique française, à Alger, dans une déclaration rapportée par l’AFP. Mais, souligne-t-on, « la France n’est pas prête psychologiquement à faire acte de repentance et il faut donc trouver une voie médiane ». Ce refus de présenter des excuses à l’Algérie a été clairement exprimé par le président Nicolas Sarkozy à la veille de sa deuxième visite en tant que chef d’Etat en Algérie le 3 décembre 2008. Le nouveau locataire de l’Elysée avait alors exclu toute idée de repentance et souhaité que s’établisse un partenariat concret, débarrassé du poids de l’histoire. « Je ne viens ici ni pour blesser ni pour m’excuser », avait-il déclaré. Rappelant qu’il n’avait « pas fait la guerre d’Algérie », il avait appelé à se « tourner résolument vers l’avenir ».
L’Algérie avait pourtant fait de la reconnaissance par Paris des « crimes » commis pendant la période coloniale une condition de la signature d’un traité d’amitié initié en 2003 par les présidents Chirac et Bouteflika. Destiné à sceller la réconciliation entre la France et l’Algérie, ce traité devait être signé fin 2005. La signature de ce traité a été renvoyée aux calendes grecques à cause de ce refus de Paris de se repentir. Bien que les relations économiques et les échanges continuent, l’Algérie diversifie ses fournisseurs et ses partenaires économiques. Les Chinois sont présents en force en Algérie, raflant des marchés à coups de milliards de dollars. Consciente des risques de voir ses parts de marché se rétrécir, la France, qui souffre d’un lourd déficit économique, montre moins de pathos et plus de pragmatisme. Surtout quand il y a 286 milliards de dollars sur la table.
Algérietele, 31 mai 20101