Emancipation, libération, panafricanisme – La longue marche

Par Malek-Mokrane Bellil
Dans les conditions globales qui furent celles du continent, ce serait un lieu commun que de dire que les premiers balbutiements qui devaient mener à un éveil de la conscience africaine furent d’abord et avant tout d’ordre culturel.
L’ordre colonial qui régnait en maître absolu sur la quasi-totalité du continent laissait, en effet, peu de place à une ou des revendications à caractère politique. C’est pourquoi les premières voix qui se firent entendre en ce début du vingtième siècle vinrent non pas du continent lui-même mais des lointaines Antilles, Caraïbes, voire des Etats-Unis.
On y abordait alors des concepts qui, quoique passés d’usage aujourd’hui, n’en contribuèrent pas moins à secouer les consciences des quelques rares élites émergées à la faveur de ce que les empires en place appelaient sournoisement leur œuvre civilisatrice.
Bien entendu, les peuples n’étaient en rien concernés par ces timides et calculées ouvertures à l’assimilation par l’école, essentiellement de citadins, ou encore d’enfants choisis parmi les membres des grandes chefferies traditionnelles.
A bien y regarder, avec plus d’un siècle de distance, ce n’est absolument pas un hasard si un pays comme le nôtre a pu, difficilement et douloureusement, parvenir à jouer le rôle qui continue malgré tout d’être le sien dans le double cadre d’une solidarité agissante aux côtés des autres peuples africains, mais aussi dans sa ferme et inébranlable inscription dans l’africanité.
C’est que des stratégies aussi pernicieuses que celles qui ont fait s’installer comme des vérités absolues et allant de soi des idées comme celle d’une Afrique noire et d’une autre blanche celle-là, dans une volonté évidente de « couper » le continent en deux parties bien distinctes et n’ayant rien à voir l’une avec l’autre, ces stratégies là, avaient largement eu le temps de peaufiner et de travailler en profondeur dans le sens de la perversion des réalités autant historiques que culturelles.
Première puis Deuxième Guerres mondiales
C’est par la violence et la guerre que le continent fut soumis à l’ordre colonial, c’est par la guerre, la Première Guerre mondiale en l’occurrence, que commencèrent à s’affirmer contacts et idées novatrices, à la faveur de l’enrôlement forcé de contingents entiers de soldats d’Afrique, puisés comme du bétail, et appelés à servir de chair à canon dans le conflit opposant les grandes puissances européennes d’alors.
En regroupant des Africains issus de régions différentes et qui, dans les conditions de l’époque pouvaient difficilement trouver la possibilité de se rencontrer, les Européens, Britanniques, Français et autres ne purent s’opposer à ces brassages d’idées nouvelles qui, certes encore confuses, allaient devenir le vivier que l’on a connu deux décennies plus tard, lorsqu’au moment du déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, l’expérience fut renouvelée de façon nettement plus large et massive.
Déjà, d’un pays à l’autre, la revendication, même formelle, non structurée et encore moins organisée, pour une prise de distance, à défaut d’une indépendance réelle et bien concrète, avait pris forme. Prises en étau entre d’une part la misère révoltante de leurs populations, et d’autre part la violence et la dureté de l’emprise coloniale, les rares élites d’alors ne purent guère trouver d’autre possibilité à l’expression de leurs revendications que dans le cadre de ce même ordre colonial qui, au reste n’en tolérait aucun autre.
C’est ce que l’on appellera un peu plus tard la politique d’assimilation. Et que devait profondément bouleverser l’appel des Américains pour l’application du principe du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Etant entendu que cet appel, qui date de la Seconde Guerre mondiale, n’avait rien de généreux et encore moins de philanthrope, mais consistait d’abord et avant tout, à leurs yeux, de profiter de l’état de guerre pour mettre en place les conditions d’une redistribution de la domination et, partant un nouveau partage des ressources et richesses.
L’exemple le plus frappant d’une telle évolution des idées se trouve dans notre pays même. C’est, en effet, à la faveur de l’accueil reçu par cet appel au sein des élites algériennes d’alors que s’opéra la première grande remise en question de l‘idée d’une émancipation par l’assimilation. L’échec avéré de cette dernière allait rapidement pousser vers des revendications de plus en plus radicales qui débouchèrent sur l’évidence que la seule issue pour se libérer de l’ordre colonial était de le combattre par la violence.
Parallèlement, et progrès remarqués des moyens de communication à l’appui, l’idée panafricaine était en marche, notamment au niveau des milieux émigrés qui se côtoyaient et se rencontraient autant à Paris, Bruxelles ou encore Londres, pour ce qui est des anglophones.
A cette différence considérable que cette idée panafricaniste, tout en conservant son fermant culturel voire même culturaliste, n’en affirmait pas moins et de façon de plus en plus nette son caractère politique.
Le combat libérateur
C’est durant le combat libérateur que s’affirmeront définitivement et avec la plus grande fermeté les liens dits alors de solidarité révolutionnaire entre notre pays et la plupart des pays africains, pour nombre d’entre eux également engagés sur la même voie. Un peu partout des représentations politiques algériennes vont voir le jour à travers les pays déjà libérés de la tutelle coloniale, mais aussi de façon clandestine mais constante et régulière dans les autres.
Des leaders vont s’affirmer qui favoriseront l’émergence de regroupements régionaux, facilitant ainsi les échanges d’information et le cadre d’un dialogue global autour de la nécessité de la prise en charge du destin de l’Afrique par les Africains eux-mêmes. Le mythique slogan remontant à l’époque de Massinissa renaissait et avec lui une conscience africaine nouvelle qui n’avait déjà plus rien à voir avec celle née aux Antilles et aux Etats-Unis.
La fin des ordres coloniaux n’était plus qu’une affaire de temps, c’est ce qui amena autant la France que la Grande-Bretagne, incapables d’ouvrir plusieurs fronts à la fois, à commencer à rechercher le consensus par la négociation et le dialogue. Nombre de pays africains devinrent ainsi indépendants sans qu’un seul coup de feu n’ait été tiré.
On ne voulait plus réitérer ces véritables massacres opérés par les différentes armées coloniales durant les différentes manifestations populaires qui ont eu lieu dans des villes comme Accra dans l’entre deux guerres. D’autres, comme le nôtre, n’arrachèrent leur indépendance qu’au prix de sacrifices en vies humaines et de l’une des guerres les plus violentes du vingtième siècle.
L’Algérie allait devenir, pour des générations d’Africains engagés sur la même voie, l’exemple à suivre. Cette aura s’affirmera avec encore plus de netteté après l’indépendance et le r
ôle de médiateur régulièrement joué par notre pays pour la résolution de nombreux conflits interafricains ou encore intervenus à l’intérieur d’un même pays comme ce fut le cas encore récemment en République démocratique du Congo.
Parallèlement, le soutien et la solidarité sans faille accordés par notre pays à la quasi-totalité des mouvements de libération africains durant les décennies soixante et soixante-dix du siècle passé, l’avaient même amené à être qualifié de « Mecque des Révolutions » autant par les Africains eux-mêmes que par les Latino américains.
C’est cela le fondement de la réussite du premier festival panafricain d’Alger en 1969, considéré alors par tous comme la concrétisation éclatante des idéaux panafricains émergés plus de soixante-dix ans plus tôt. Ce second nous dit-on, est celui de l’affirmation des cultures africaines et de leur juste place aux côtés de toutes les autres. Qui pour s’en plaindre ?
M-M. B. 
La Tribune des Lecteurs, 2/7/2010
COMMENTAIRE DE DIASPORA SAHARAUI :
Il convient de demander le rôle du Maroc sur la sphère africaine.  Nombreuses sont les occasions dans lesquelles les forces armées marocaines ont activé sur le continent noire, seulement c’était à côté des forces colonialistes françaises au Congo, en Côte d’Ivoire, et à côté des américains en Somalie. 
Au moment où tous les pays africains et du monde entier boycottaient le régime raciste de l’Afrique du Sud, le Maroc lui achetait des armes pour combattre les forces du Polisario au Sahara Occidental. Les blindés sudafricains récupérés dans les batailles du Sahara avaient été offerts à l’ANC.
Donc, le Maroc, depuis son indépendance s’est toujours positionné du mauvais côté et c’est le cas jusqu’à présent.
Contrairement à ce que la MAP puisse prétendre, les africains sont unanimes dans leur soutien au droit d’autodétermination du peuple sahraoui. Ceux qui sont avec Rabat se comptent avec les doigts d’une seule main : Les deux Guinées, équatoriale et Conakry, le Gabon, le Sénégal et la Côte d’Ivoire. En d’autres mots, les antennes de la Françafrique qui veulent que le colonialisme revienne en Afrique.
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