Dans le charivari qui caractérise les relations euro-méditerranéennes, la démarche du Maroc mérite que l’on y prête attention. A l’heure même où l’Union pour la Méditerranée (UPM) semble durablement enlisée alors qu’elle s’apprête à fêter son deuxième anniversaire le 13 juillet prochain, le Royaume continue de jouer sa propre partition européenne. Un rapide examen des relations entre Rabat et l’Union européenne (UE) met ainsi en relief l’omniprésence d’une expression à savoir le «partenariat avancé». Le Maroc est d’ailleurs le seul pays de la rive sud de la Méditerranée à bénéficier de ce statut.
Un avantage politique et économique
On s’en doute, cette exception est une source de fierté pour les officiels marocains. Dans le jeu politique régional marqué par la rivalité algéro-marocaine mais aussi par la compétition économique entre la Tunisie et le Maroc, le statut avancé est un argument destiné à démontrer que le Royaume chérifien est en avance sur ses principaux voisins. Cela explique d’ailleurs la position plutôt mesurée pour ne pas dire ambiguë de Rabat vis-à-vis de l’Union pour la Méditerranée. D’accord pour y participer mais pas question d’abandonner le statut avancé ou de le voir banalisé par l’UPM : tel pourrait être le message marocain à l’égard des (rares) défenseurs de ce processus euro-méditerranéen voulu par Nicolas Sarkozy. Le paradoxe dans l’affaire, c’est qu’il est très difficile de définir ce qu’est le statut avancé ni même d’en saisir les contours. «C’est être dans l’Europe sans faire partie des institutions européennes» clame-t-on au Maroc comme à Bruxelles. En clair, le Maroc n’est pas la Serbie ou l’Albanie et encore moins la Turquie. Pas question donc d’évoquer une possible adhésion à l’UE. Dans le même temps, il est difficile de faire la différence entre l’accord d’association signé entre le Maroc et l’UE en 1996 et le statut avancé. Du coup, c’est vers les patrons marocains qu’il faut se tourner pour essayer de comprendre les avantages d’un lien que d’aucuns qualifient d’ores et déjà d’élément de propagande destiné à améliorer l’image du Maroc en Europe – et donc à faire en sorte de lui attirer encore plus de soutiens dans le dossier du Sahara.
Prudents, pas dupes de l’aspect de politique extérieure qui caractérise ce statut, nombre de patrons marocains sont toutefois satisfaits de cette amarre avec l’Europe. Selon eux, il s’agit d’un canevas utile qui va tirer l’économie marocaine vers le haut. De fait, sans évoquer la question de l’adhésion à l’UE, ce statut offre la possibilité au Maroc d’accéder à l’acquis communautaire. A titre d’exemple, cela signifie qu’à terme, les normes industrielles marocaines seront identiques aux normes européennes et un produit fabriqué à Tanger ou à Casablanca pourrait même être exporté avec le label «made in EU», ce qui est un avantage compétitif certain. Le statut avancé est donc une porte ouverte à la convergence entre le Maroc et l’Union européenne ne serait-ce que sur le plan réglementaire et normatif. Cela ne garantit pas le décollage économique du royaume ni la disparition des inégalités qui minent sa société mais c’est déjà un atout qui ne demande qu’à être valorisé.
Pas d’exigence démocratique
A l’inverse, rien ne garantit que le statut avancé soit le catalyseur qui permettra au Maroc d’améliorer sa gouvernance et de faire des progrès en matière de respect des droits de la personne humaine. Contrairement au processus d’adhésion à l’UE qui oblige à respecter les critères de Copenhague – et la Turquie en sait quelque chose – l’obtention du statut avancé n’en est guère dépendante. C’est la volonté manifeste des Européens. C’est la preuve que l’Europe estime que le décollage économique du Maroc, et de façon plus générale du Maghreb, n’a rien à voir avec la démocratie et la pratique de meilleures gouvernances.
Djazair avant tout
Le Maroc et le statut avancé
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