Un journaliste algérien dans la ville occupée de Dakhla

Echorouk, premier journal à s’incruster dans la ville de « Dakhla » : trois jours dans les territoires sahraouis occupés avec un peuple qui ne croit qu’à l’autodétermination
J’ai beaucoup entendu parler de la ville de « Dakhla », de sa résistance à travers les époques contre toutes les formes d’occupation étrangère, ainsi que de ses richesses qui attisent les convoitises et ses ressources hialeutiques extraordinaires. Partant de ces symboles bien nichés dans ma tête, j’ai tant et tant souhaité visiter cette ville.
Ainsi, lorsque j’ai reçu l’invitation pour participer à ce qui était appelé un « colloque international » sur « le Sahara Occidental et l’avenir de la sécurité régionale dans le pourtour méditerranéen », je savais à quelles critiques je m’exposais en tant qu’écrivain et journaliste algérien prenant part à une réunion pareille. Evidemment, je n’étais pas dupe de qui était derrière le rideau et à quel objectif ses tenants tendaient, mais je décidais de saisir cette opportunité qui s’offrait à moi pour voir de près la toile de fond de ceux qui essayaient d’imposer par la force un plan d’autonomie sous la souveraineté marocaine sur les territoires occupés, et que la quasi-totalité du peuple sahraoui rejetait, s’accrochant à un seul et unique credo : l’autodétermination, laquelle mettrait fin à l’occupation marocaine.

J’ai visité, le 24 avril dernier, la ville de « Aça », mais je ne suis pas arrivé à saisir le tableau dans son ensemble, bien que la réunion à laquelle j’avais prit part était à ce point intéressante, pour me laisser participer à un colloque qui consacrait la vision marocaine, certes, mais qui était édifiant sur le refus opposé par les militants sahraouis, dont certains étaient présents dans la salle, et avant de la quitter, martelaient des formules comme « les armes, les armes », « la lutte, la lutte », malgré la présence en force des services de police et de gendarmerie marocains.
Lors de cette réunion d’ « Aça », il s’est passé que les organisateurs voulaient interdire aux jeunes sahraouis de s’exprimer, mais lorsque je me suis intercédé auprès du président du colloque, en lui expliquant qu’il s’agit des jeunes sahraouis, qui veulent parler de leurs problèmes, et que cela les concerne en premier ordre, alors il acquiesça sans tergiverser et les laissa donner libre cours à leurs critiques.
De retour d’ «Aça », je pus à loisir constater l’ampleur des dégâts provoqués par ma participation : mon algérianité –que je revendique, et dont je suis très fière- a été mise en exergue pour des motifs évidents, comme si cela pouvait représenter une caution pour le Maroc, mes paroles ont été déformées, et des coupes de la censure sont intervenues pour atrophier mes entretiens donnés à des médias marocains. Bien sur, je ne pouvais que regretter ma participation, mais je connaissais trop les enjeux et les dessous pour être surpris par de pareilles situations.
En fait, j’ai préféré me taire, et attendre de meilleurs jours, jusqu’à ce que la chance a une nouvelle fois, frappé à ma porte. Le colloque de « Dakhla » était cette chance qui m’était offerte. Je m’étais entendu au préalable avec le directeur d’Echorouk, Ali Fodhil, pour faire un reportage sur « Dakhla », puisqu’il était du domaine de l’impossible qu’un journaliste algérien pût le faire, pour des raisons évidentes.
Je reçu sur mes émails une menace de mort de la part d’une personne, qui de toute évidence, ne voulait pas de ma participation à « Dakhla ». Elle s’est présentée dans son message comme un sahraoui, et le Proxy utilisé provenait des Etats-Unis. Mais les organisateurs ont fait vite évaporer mes appréhensions, affirmant que la ville était des plus paisibles et des plus sécurisées, et qu’il s’agissait certainement de groupes rivaux de la société civile – ce qu’on appelle « la diplomatie parallèle ».
Le 25 juillet, je pris le vol de Paris-Dar El Baida, et de là nous partîmes pour la ville de « Dakhla ». J’ai trouvé les organisateurs en place, qui m’attendaient, et avaient donné des directives pour que tout nous soit facilité.
Avant de fouler le sol de Dakhla, je m’étais assigné comme mission de rester neutre, de ne rechercher que la vérité et de la dire, quel qu’en soit le coût, afin de garder intacte ma crédibilité. Je m’étais aussi assigné la mission de trouver des Sahraouis, d’écouter leurs protestations et leurs doléances et de les diffuser au monde entier. J’ai passé ma nuit dans l’hôtel « Bab al Bahr », à retourner ces choses dans ma tête, mais en même temps je me disais que les Sahraouis pourraient ne pas vouloir me parler, d’autant plus que c’est la partie marocaine qui organise ce colloque. Les médias marocains ont voulu faire de moi quelqu’un qui plaide pour le Maroc.
Le matin du 26 juillet dernier, je voulais aller à la découverte de la ville, mais certains des organisateurs du colloque étaient déjà présents pour m’accompagner. Je remarquais la présence suspecte d’éléments des services de renseignement marocains, en tenue sahraouie et en survêtement, et on tentait de me convaincre qu’ils étaient là pour ma propre sécurité après les menaces dont j’ai été destinataire…
Echourouh online, 2/8/2010
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