Le gouvernement marocain a procédé à la fermeture des bureaux d’Al Jazeera au Maroc. Ne discutons pas du principe général du respect de la liberté d’expression, personne ne sera à l’abri d’un reproche – pas même les Etats-Unis. Ce qui est étrange, en l’occurrence, c’est que Al Jazeera est acquise au Maroc, y compris sur la question du Sahara occidental. Et par contrecoup hostile à l’Algérie dont elle ne veut véhiculer, depuis avant son interdiction, que les plus mauvaises nouvelles. Or, voilà que le gouvernement du royaume, après lui avoir fermé le bureau d’où elle diffusait son journal du Maghreb, décide de lui interdire toute activité sur son territoire pour, résumons : absence d’objectivité et partialité dans le traitement des informations. Etrange, n’est-ce pas ? Mais pas tant que cela. Il semble plutôt qu’il s’agit d’un malentendu entre les deux parties.
Al Jazeera ne cesse de s’étonner de ces mesures à son encontre. Non parce qu’elle se prévaut d’objectivité, il n’en a jamais été question pour cette chaîne – pour toutes sortes de raisons liées à sa dépendance financière et politique. Elle n’a simplement pas compris que ce qui est attendu d’elle, c’est son implication totale dans les thèses monarchiques sur le Sahara occidental. En retour de sa liberté d’activer dans ce pays, il lui fallait devenir un instrument de propagande pour la politique du Maroc, et accessoirement pour sa promotion touristique. Elle prétendait servir le roi par de la «communication moderne», un peu comme elle fait ailleurs. Ses services ne suffisaient pas. En somme, la communication peut même s’avérer dangereuse, pour un pays qui n’hésite pas à mobiliser tout ce qu’il peut pour mener des campagnes médiatiques sans fin.
Al Jazeera aurait dû prendre exemple sur Medi1 si elle voulait continuer à travailler au Maroc, voilà ce que lui signifie le roi. Ensuite, derrière Medi1 ou France 24, il y a la France qui soutient le Maroc, et ce n’est pas rien. Alors que derrière Al Jazeera, il n’y a que du vide. Cette chaîne pèche par un excès de confiance en elle-même. Une folie des grandeurs. Passe encore, si elle faisait preuve d’une objectivité sans faille ou, tout du moins, d’une certaine impartialité. Mais non, elle n’hésite pas à organiser elle-même des campagnes contre les régimes qui ne lui plaisent pas, sous prétexte d’être le porte-voix de «l’opinion arabe», et d’épargner les régimes qui lui plaisent, à commencer par le Qatar, naturellement – ou ses voisins du Golfe. Elle ne sert pas son opinion de prédilection, comme elle l’affirme sans cesse, mais tout au contraire : les rois, les puissants, les forts, les fortunés… D’ailleurs, Al Jazeera est une télé bourgeoise, en plus d’être vulgaire. Elle ne sert pas non plus les Palestiniens, mais plutôt leur ennemi israélien – et elle s’en serait aisément aperçue si elle maîtrisait réellement les techniques de la communication moderne. Avec ses immenses moyens, Al Jazeera aurait pu devenir la fierté des Arabes, elle en est très loin. Tout au plus pouvons-nous la considérer comme la voix de son maître.
B. D.
B. D.
Le Jour d’Algérie, 31/10/2010
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