Le makhzen, qui ne s’encombre d’aucun scrupule quand il s’agit de viser la stabilité de son voisin de l’Ouest, a multiplié les coups bas et les tentatives d’infiltration dont la plupart ont fini par se retourner contre lui. Chronique d’une «complotite» dont ne sont même pas exclus les actes terroristes.
L’activité souterraine de la DGED (direction générale d’études et de documentation, les services du contre-espionnage marocain) continue dans les pays voisins dont la position compte dans la recherche d’une solution au conflit sahraoui-marocain. C’est ainsi qu’en janvier 2011, deux marocains amazighs sont arrêtés par l’agence libyenne de sûreté extérieure. Ils exécutaient un plan concocté par la DGED et le Mossad dans le but « de briser l’unité territoriale del’ Algérie, la Libye et la Tunisie «. Les complots visant à déstabiliser l’Algérie et à y déclencher des émeutes factices dans le but de l’affaiblir, et même d’en morceler le territoire, ne sont donc pas qu’une simple vue de l’esprit. Le Maroc, aidé en cela par les éléments du redoutable Mossad sioniste, a toujours comploté contre l’Algérie. À Nouakchott, un agent qui agit sous couvert de correspondant de la MAP en Mauritanie (cette agence de presse marocaine qui, très souvent, a servi de couverture bidon à des agents secrets en mission d’espionnage, de sabotage et même d’éliminations physiques à travers le monde), Abdelhafid El Bakkali, a été sommé, en décembre 2011, de quitter le territoire mauritanien dans un délai de 24 heures à cause de son activité visant, entre autres, à dénigrer le Polisario et l’Algérie dans les médias mauritaniens. Pire encore, certaines sources accusent les services marocains d’être derrière la tentative d’assassinat du président mauritanien Mohamed Ould Abdelaziz. Si aucune preuve n’a pu être sortie à l’appui de ces dires, la thèse paraît en revanche particulièrement plausible pour qui connaît le manque de scrupule dont font preuve les agents secrets marocains. Non contents de jouir d’un impressionnant budget de un milliard de dollars par an (au regard de la taille du royaume chérifien et du faible PIB), ils n’hésitent pas non plus à arrondir de manière très substantielle leurs «fins de mois» en se livrant à un très vaste trafic de drogue au niveau de toute la vaste bande sahélo-saharienne, ainsi que vers la plupart des pays du Vieux continent. Cette activité, qui relève du secret de Polichinelle, a été dénoncée à maintes fois par plusieurs capitales étrangères, mais aussi par les instances spécialisées de l’ONU.
En mai 2013, le Centre national d’intelligence espagnol (CNI) a ordonné l’expulsion de Nour-Eddine Ziani, un marocain accusé d’être un «agent» de la DGED, et de mettre en danger la sécurité de l’État à cause de ses «relations» avec l’islamisme radical. Car il faut signaler que la DGED n’hésite même à se fourvoyer avec ces milieux extrémistes et criminels, étant entendu que le Maroc avait déjà soutenu les criminels du GIA durant les années 90, quand le défunt roi Hassan II voulait faire de l’Algérie un « laboratoire à ciel ouvert « et que c’est également lui qui se trouve derrière la création du MUJAO (mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’ouest).
Dans la ville algérienne de Tindouf, des ressortissants algériens, dont certains sont d’origine du sud du pays, ont été recrutés pour mener des activités subversives dans les camps des réfugiés sahraouis et un vaste trafic de cannabis est organisé en vue de saper le moral des sahraouis, tout en accusant les dirigeants du Polisario «de collusion avec le trafic de drogue et les organisations terroristes», alors que c’est bien entendu l’inverse qui est vrai. Des officiers de l’armée marocaine installés dans les Zouérate vont fournir la drogue aux trafiquants. Dans les camps, d’autres agents vont attiser le feu de la rébellion contre la direction du Front Polisario. La dernière en date a trait à une manifestation devant le siège de la présidence sahraouie contre les mesures prises par le Front Polisario pour combattre la contrebande de carburants.
Trafic de drogue, activité terroriste et corruption tous azimuts…
Déjà, la DGED a réussi, en 1990, à infiltrer le ministère des Affaires étrangères espagnol. Son agent lui a transmis un rapport confidentiel sur le contenu d’une rencontre entre le ministre des Affaires étrangères de l’époque, Francisco Fernandez Ordoñez et un responsable du Front Polisario. Selon Mondial Niews, en Belgique, le 8 juillet 2008, le patron de la Sûreté belge Alain Winants demanda à Mohamed Yassine Mansouri, chef de la DGED, de rappeler trois agents marocains repérés en Belgique. «Cette mesure n’était pas liée à l’affaire Belliraj. Dans le passé, il y a déjà eu des problèmes répétés avec les agents de la DGED. Ils avaient par exemple organisé une manifestation devant l’ambassade d’Algérie à Bruxelles», déclare Alan Winants. «Les allégations de la Sûreté belge étaient tellement graves que la DGED a non seulement rappelé les trois agents démasqués mais également décidé de fermer carrément sa représentation en rappelant tous ses agents», a ajouté la même source. En 2008, les services secrets marocains ont réussi à recruter Redouane Lemhaouli, 42 ans, un policier hollandais d’origine marocaine qui avait accès à la base de données du ministère de l’Intérieur des Pays Bas, qu’il transmettait aux officiers de renseignement exerçant à l’ambassade marocaine sous couverture diplomatique. Au mois de juin 2010, l’ex-policier sahraoui Mustapha Salma Sidi Mouloud se rend dans la ville occupée de Smara où se trouve son père. Mustapha appartient à la même tribu que le transfuge Omar Hadrami. Celui a été désigné par Rabat comme chef du budget alloué aux subventions appelées communément «cartilla», une aide destinée aux plus démunis. Hadrami mise sur deux axes pour attirer ses proies : le tribalisme et les 2 000 Dirhams mensuels. Mustapha est vite contacté par Hadrami. Ils passeront trois mois ensemble à Rabat pour préparer l’opération du retour de Mustapha en Algérie pour louer les «bienfaits» de la proposition marocaine d’autonomie. Deux mois avant son retour, les médias marocains vont relayer son histoire. Le coup médiatique est réussi, mais inefficace parce que Mustapha, après avoir embrassé les thèses marocaines, n’a plus le droit de revendiquer le statut de refugié en Algérie.
Le succès médiatique du recrutement de Mustafa Salma Sidi Mouloud a encouragé les services secrets marocains à redoubler leurs opérations dans les camps des réfugiés sahraouis de Tindouf. Dans ce but, les marocains ne rechignent pas sur les moyens. Selon le site Bladi, se basant sur des informations rapportées par le journal libanais Addiyar, le budget de la DGED avoisine un milliard de dollars par an, auquel il faut ajouter les très conséquents dividendes récoltés grâce au trafic de drogue.
Un mois après le feuilleton de Mustapha, deux coopérants espagnols et une italienne sont kidnappés de Rabouni, siège des principales administrations de la RASD. Al-Qaïda nie toute implication dans cette opération. Une semaine après, un mystérieux mouvement revendique l’enlèvement. Il se fait appeler MUJAO. Les conséquences auraient pu être néfastes pour les sahraouis. Mais les soupçons des sahraouis sont vite portés sur les services secrets marocains. En plus, le MUJAO, au lieu de diriger ses opérations vers les pays de l’Afrique de l’Ouest, ne vise que le Polisario et l’Algérie, puisqu’il se trouve derrière les deux attentats qui avaient touché les postes de gendarmerie de Tamanrasset et Ouargla. L’Algérie, on s’en doute bien, est visée non pas seulement parce qu’elle soutient les principes du droit international en ce qui concerne la cause sahraouie, mais aussi pour saper sa position de partenaire numéro 1 des USA dans la lutte antiterroriste au Sahel contre Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).
Kamel Zaïdi
Le Courrier d’Algérie, 04/02/2014