Processus de paix au Mali : Rabat veut court-circuiter Alger

Enfin, sur la récente tournée dans la région de Christopher Ross, envoyé spécial du SG de l’ONU pour le Sahara Occidental, Madjid Bouguerra souhaite que «la poursuite des efforts de M. Ross, permette, avec la bonne volonté et la disponibilité, en particulier, des deux parties en conflit, de faire progresser ce dossier de décolonisation». 
par Yazid Alilat
Sans désigner directement le Maroc d’être derrière la volte-face de beaucoup de parties prenantes dans la crise malienne, Madjid Bouguerra, ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines, a accusé des parties et des pays qui «tentent de saper» les efforts de l’Algérie en faveur de la paix et la sécurité au Mali. 
Durant l’émission de ‘Canal Algérie’ «Sur le fil», il a affirmé qu’il existe, actuellement, «des interférences qui tentent de saper et perturber les efforts de l’Algérie, en faveur de la paix et la sécurité au Mali». Pour Madjid Bouguerra, «ces interférences proviennent de parties et de pays qui ont des agendas autres que la paix et la sécurité de la région». Il s’agit, en fait, clairement du Maroc qui a tenté de saborder la démarche algérienne de rassembler l’opposition malienne, y compris les Touareg du MNLA, qui n’ont pas fait le voyage, en janvier dernier, pour définir avec les autorités à Bamako, une plate-forme de réconciliation avec tous les mouvements d’opposition. Selon le ministre algérien, le gouvernement malien «est conscient de cela» et «avec son soutien et son appui, nous allons essayer d’accélérer» le processus de paix et de sécurité dans le pays. 
Il a, ainsi, rappelé qu’en janvier dernier, l’Algérie avait entamé, à Alger, des pourparlers exploratoires (avec des mouvements rebelles maliens), qui avaient, pour objectif principal, de ramener tous les mouvements, opérant au nord du Mali, autour des éléments essentiels, pouvant constituer une plate-forme de négociations avec le gouvernement malien, à Bamako et ouvrir la voie à une solution au problème du Mali». 
A la rencontre d’Alger, tenue dans la plus grande discrétion, trois mouvements d’opposition maliens dont la Coordination des mouvements et forces patriotiques de résistance (CMFPR) et le Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA), étaient présents. Excepté le plus important, le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), qui a préféré, lui, aller à Rabat, négocier une médiation marocaine. Une aubaine pour le roi qui veut se poser comme médiateur dans ce conflit, mais en sous-traitant de Paris. Madjid Bouguerra confirme: trois mouvements avaient accepté de signer une plate-forme commune (à Alger) sauf le MNLA, un mouvement qui est, a-t-il dit, ‘’traversé par des difficultés internes”. 
Ce que ne dit pas le ministre, c’est que les dirigeants du MNLA, dont Ag Chérif, qui a été reçu par Mohamed VI, le 15 janvier dernier, semblent refuser la médiation algérienne dans le règlement de ce conflit, au profit de celle du Maroc. Pour le ministre, des efforts supplémentaires doivent être faits pour amener le MNLA «à aller vers la dynamique opérée, à partir d’Alger, en janvier dernier». Un vœu pieux ? Pas évident, puisque la rébellion touareg a toujours brillé par son inconstance, d’autant que la «solution marocaine» que préconise le MNLA, plus important groupe de l’opposition malienne, actuellement, n’est pas, sans être rattachée à la nouvelle politique étrangère française en Afrique, et plus spécifiquement au Sahel. Auquel cas, l’intermédiation marocaine, dans ce conflit, n’est qu’une prestation ou «un service fait», dans l’agenda des autorités françaises pour refaire le Sahel, selon leurs intérêts stratégiques du moment, à commencer par la lutte contre la menace terroriste. L’intervention militaire, en janvier 2012 contre les bases d’Aqmi, au Mali, en est un parfait exemple, puisque Paris, s’il a applaudi l’élection d’un nouveau président malien, a, ensuite, retiré ses billes du jeu, quand il s’est agi de rapprocher le nouveau pouvoir à Bamako et la rébellion, dont celle touareg, traditionnellement proche des services de sécurité français. 
Par ailleurs, sur la relation avec le Maroc, le ministre algérien, chargé des Affaires maghrébines, a souligné que l’Algérie espère que le Maroc cesse ses attaques contre l’Algérie et revienne «à la retenue et la sagesse». Pour lui, il faut que les campagnes anti-algériennes, orchestrées par le Maroc via, notamment, ses médias et les partis politiques cessent, pour nous permettre de construire, dans la sérénité, une relation apaisée entre deux pays frères et voisins qui partagent, tellement, de choses ensemble”. Quant aux demandes pressantes du Maroc pour l’ouverture des frontières, il a souligné que «nous avons déjà essayé, en 2000, 2005 et 2011, de travailler dans un processus graduel, car nous voulions résoudre tous les problèmes qui existent, au plan bilatéral, avant d’aller vers cette perspective». «Malheureusement, à chaque fois que nous entamions des démarches et des efforts, nous nous retrouvons dans des problèmes qui ont bloqué tous les efforts et initiatives», a-t-il encore regretté, avant de préciser que la construction d’un Maghreb fort ne dépend pas du dossier sahraoui, qui est traité aux Nations-Unies. 
Enfin, sur la récente tournée dans la région de Christopher Ross, envoyé spécial du SG de l’ONU pour le Sahara Occidental, Madjid Bouguerra souhaite que «la poursuite des efforts de M. Ross, permette, avec la bonne volonté et la disponibilité, en particulier, des deux parties en conflit, de faire progresser ce dossier de décolonisation».
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