Un tribunal espagnol ouvre le dossier : Génocide marocain au Sahara Occidental

Onze hauts fonctionnaires, policiers et militaires marocains risquent d’être, pénalement, poursuivis par la Justice espagnole pour «génocide» au Sahara Occidental, ancienne colonie espagnole, annexée par le royaume chérifien, en 1975, après le départ des forces espagnoles. 
Un chef d’inculpation lancé par le juge Pablo Ruz de l’ «Audiencia Nacional d’Espagne», l’une des plus hautes instances juridictionnelles d’Espagne, dénonçant, ce jeudi, des «attaques systématiques» contre les civils, entre 1975 et 1991. L’arrêt de Ruz suit la demande du parquet qui s’était déclaré favorable à ces poursuites, il y a plusieurs mois. 
Le magistrat estime qu’il «existe des indices rationnels» permettant de juger les inculpés pour «génocide», dans les conclusions d’une enquête, ouverte en octobre 2007, par le célèbre juge Baltasar Garzon après le dépôt de plaintes, en septembre 2006, par des Associations de défense des droits de l’Homme et des familles de victimes, faisant état de la disparition de plus de 500 Sahraouis, à partir de 1975. 
Baltazar Garzon a décidé, donc, d’ouvrir une enquête pour déterminer s’il y a eu génocide ou pas, au Sahara Occidental, perpétré par le Maroc. 
Le juge, suspendu en 2012, de la magistrature pour 11 ans, par la Cour suprême espagnole, avait demandé, auparavant, à Rabat si elle avait enquêté sur les disparitions de Sahraouis. 
La justice espagnole aura, ainsi, à enquêter sur les responsabilités de 13 suspects sur un total de 32, dont certains sont décédés, notamment l’ex-ministre Driss Basri qui a été, pendant 20 ans, le ministre de l’Intérieur de Hassan II. Les responsables marocains, visés par les plaintes, sont, généralement, accusés de «détentions illégales, d’enlèvements, de tortures et de disparitions». Pablo Ruz, par ailleurs, a lancé un mandat d’arrêt pour 7 suspects, déjà mis en examen, et a délivré 4 commissions rogatoires pour 4 autres personnes, afin que les poursuites leur soient notifiées, car elles n’étaient pas visées jusque-là. On retrouve parmi les 7 premiers cités, le militaire Abdelhaq Lemdaour et le colonel de la Gendarmerie royale Driss Sbai, chefs du quartier général des Forces armées et de la Gendarmerie de Smara, lors de l’annexion du Sahara Occidental.
Ils sont considérés comme responsables des tortures administrées à Hadram Abderrahman, arrêtée le 15 décembre 1975, chez elle, et arrachée par la force à son bébé de moins d’un an qu’elle allaitait. Selon l’enquête, elle a été torturée, quotidiennement, durant un mois et demi «pendant un temps indéterminé, avec des pauses de 10 à 15 minutes» et «victime d’agressions sexuelles». Elle était «notamment attachée par les pieds et tête en bas, pendant qu’elle était frappée à coups de bâton» ou «couchée nue sur une table et frappée jusqu’à ce que la peau se détache». Le juge cite, aussi, le cas d’Omar Buzeid Ahmed Baiba, un commerçant «de nationalité espagnole», arrêté, le 10 juillet 1976 par la Gendarmerie royale, à Smara et «torturé au moins pendant 4 mois et 15 jours, à coups de décharges électriques, dans les parties génitales, la bouche et les doigts», avant de disparaître. Abdelhafid Ben Hashem, l’ancien gouverneur de l’administration territoriale du ministère de l’Intérieur marocain, jusqu’à 1997 ainsi que Saïd Ouassou et son successeur Hassan Oushen, gouverneurs de Smara, entre 1976 et 1978 font, également, partie des responsables marocains mis en examen. Pour Pablo Ruz, les critères qui permettent de retenir le crime de génocide sont réunis, les victimes ayant été persécutées, en raison «de leurs origines, dans le but de détruire, partiellement ou totalement, la population sahraouie et s’approprier son territoire», à travers «les bombardements contre des campements de population civile et de leurs déplacements forcés, d’assassinats, de détentions et disparitions de personnes d’origine saharouie».
Le Maroc n’a pas, encore, réagi, officiellement, au rapport du juge espagnol. 

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