Après y avoir tenu sa session
annuelle en 2015, le Forum
mondial de Crans Montana va à
nouveau célébrer cette année son
30e anniversaire à Dakhla, au
Sahara occidental. Ce choix
curieux pour un rendez-vous qui,
d’ordinaire, se tient en Suisse, là
où il a été créé en 1986, est le
résultat de l’intense eff ort de
lobbying que le Maroc a mené en
direction des responsables et
organisateurs du Forum.
va aboutir à la tenue d’une grande manifestation
internationale, une sorte de mini-Davos
du désert, dans une ville et un territoire
placés sous le signe de la décolonisation et dont
le règlement du statut est à l’ordre du jour du
Conseil de sécurité des Nations unies.
En parvenant à ce résultat, parce que rien n’indique
pour l’instant que les organisateurs du
Forum de Crans Montana vont annuler leur
rendez-vous sahraoui prévu du 12 au 14 mars
prochain, Rabat entend faire coup double. Il
s’agit, pour le royaume chérifi en, de pratiquer
la politique du fait accompli, d’agir en toute
souveraineté sur un territoire qui ne lui appartient
pas, aux yeux de la légalité internationale,
et de vendre son potentiel économique à des
investisseurs peu préoccupés par les questions
d’autodétermination sous le signe à la mode
d’une Afrique comme nouvel horizon de croissance
mondiale et comme futur grand lieu
d’échanges mondiaux.
Les thèmes retenus pour les trente bougies du
Forum à Dakhla ont été choisis pour séduire, en
eff et. En présence d’acteurs politiques et d’opérateurs
économiques mais aussi de représentants
gouvernementaux et d’ONG, on y parlera
des relations Sud/Sud et de l’encouragement
des fl ux d’aff aires et d’investissements entre le
Maroc et l’ensemble des pays d’Afrique. En
marge du Forum, a-t-on appris, les organisateurs
vont lancer le «Crans Montana African
Women’s Forum» sur le thème porteur des
«Femmes dans les aff aires et la politique».
Parmi les grandes dames qui soutiennent l’organisation
de ce Forum féminin à Dakhla, indiquent
des sources marocaines, fi gurent Simone
Veil, membre du Conseil constitutionnel français,
Nana Konade Rawlings, première dame
du Ghana, Huguette Labelle, présidente de
Transparency International, Maria Da Luiz Dai,
première dame du Mozambique, ainsi que plusieurs
représentantes de gouvernements et
d’ONG d’Europe, des Etats-Unis, d’Afrique et du
monde arabo-musulman.
Mais entre l’intention et la réalité, il y a un
fossé que les indépendantistes sahraouis veulent
davantage creuser. Pour eux, qui s’étaient
déjà insurgés avec un succès mitigé contre la
session de 2015 et qui veulent cette fois-ci ne
pas rater l’occasion de le dénoncer, la tenue au
Sahara occidental d’une manifestation internationale
sur les aff aires et les investissements
encouragée et parrainée par Rabat est une violation
caractérisée du droit international et une
opération destinée à bluff er la communauté internationale
sur un dossier dont le règlement
est en attente depuis quatre décennies.
Leur appel au boycott du Crans Montana de
Dakhla semble avoir été entendu, puisque, samedi
dernier, le secrétaire général des Nations
unies, Ban Ki-moon, a, selon des sources sahraouies,
appelé tous les fonctionnaires et les
organes de l’ONU à ne pas participer à l’évènement.
Par ailleurs, l’Organisation des Nations
unies pour l’éducation, la science et la culture
(Unesco), sur la participation de laquelle les
organisateurs marocains ont fait une grande
publicité, se dit contre la tenue de la prochaine
édition du Forum à Dakhla.
«Je tiens à vous informer que cette année encore
l’Unesco n’a été ni consultée ni associée à
l’organisation de cet événement, et notre organisation
n’a à aucun moment confi rmé sa participation
d’une quelconque manière et n’y participera
pas», a écrit le sous-directeur général
pour les relations extérieures et l’information
du public, Eric Falt, dans une lettre au président
du Comité suisse de soutien au peuple sahraoui,
Berthier Perregaux, citée mercredi par
l’agence de presse sahraouie SPS.
«L’Unesco, comme vous le savez, ne saurait
s’associer à une conférence se tenant à Dakhla,
conformément aux résolutions pertinentes du
Conseil de sécurité de l’organisation des Nations
unies, auxquelles notre organisation est
tenue à se conformer», a soutenu l’organisation.
A suivre, donc.
Selon le Front Polisario
Le Maroc se dresse contre la prochaine visite de Ban Ki-moon dans la région
Le gouvernement marocain se dresse
pour empêcher la visite du secrétaire
général de l’ONU au Sahara occidental,
pourtant approuvée par le Conseil de
sécurité, a indiqué le représentant du
Front Polisario auprès des Nations unies,
Ahmed Boukhari. « C’est une véritable
démonstration d’obstruction aux eff orts
du secrétaire général de l’ONU, le
gouvernement marocain continue à
mettre des obstacles pour empêcher la
visite de Ban Ki-moon dans la région a
déclaré M. Boukahri à l’APS. Après avoir
échoué à annuler cette visite, prévue fort
probablement pour début mars prochain,
le Maroc veut maintenant la reporter à
juillet, a fait savoir M. Boukhari.
« Les autorités marocaines ne veulent pas
que cette visite ait une relation avec le
prochain rapport sur le Sahara occidental»
que doit présenter Ban Ki-moon au
Conseil de sécurité en avril, a-t- il expliqué.
« C’est une stratégie bien connue du
Maroc: bloquer tout progrès dans le
dossier sahraoui pendant le mandat de
Ban Ki-moon qui arrive à échéance en fi n
2016 ». M. Boukhari a indiqué que le
Conseil de sécurité, réuni mercredi passé
à l’initiative du Venezuela, a réitéré son
soutien unanime à la visite du secrétaire
général dans la région. « Actuellement
tous les membres du Conseil de sécurité
soutiennent cette visite à l’unanimité et
affi rment qu’il serait idéal de l’organiser
avant avril », a ajouté M. Boukhari. Il y a
lieu de souligner que ce soutien a été
exprimé même par la France, membre
permanent du Conseil de sécurité
considéré par les indépendantistes
sahraouis comme un soutien aux thèses
de Rabat sur le Sahara occidental
Jusqu’ici, les dates des entrevues prévues
entre le SG de l’ONU et le gouvernement
marocain n’ont pas été fi xées, le Maroc
refusant toujours de donner une suite
positive à l’agenda du SG concernant sa
visite à Rabat. Encore faut-il souligner que
le Maroc n’est pas en mesure d’imposer
son agenda pour cette visite encore moins
d’empêcher Ban Ki-moon d’aller aux
territoires occupés sur lesquels il n’a
aucune autorité. Le Sahara occidental est
considéré par l’ONU comme un territoire
non autonome, dont le statut doit être
déterminé par voie de referendum
d’autodétermination, a tenu à rappeler M.
Boukhari
http://www.reporters.dz/
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