» Alger, forcément » profondément désolée » par cette attitude, aura toutes les bonnes raisons de l’évoquer en toute » franchise » et » amitié « . A bon entendeur… »
Par Mohamed Abdoun :
J’avoue que j’avais l’intention de ne pas aller plus loin que le billet consacré au sujet en page 23. Mais c’était sans compter avec cette inélégante sortie du Premier ministre français sur son compte Twitter. Certes, il a parfaitement le droit d’être » désolé « , et même de se résoudre à en parler à ses » vis-à-vis » algériens en toute » franchise » et » amitié « , cela même si le sujet n’est pas du tout inscrit à l’ordre du jour de cette » importante » visite. Il a ses droits. Tous ses droits. Ainsi que d’autres. Beaucoup d’autres. Mais pas celui de forcer la main aux autorités algériennes, encore moins prétendre agir en notre nom. Non, monsieur Valls ! Non, ce ne sont pas tous les Algériens qui souffrent maladivement du » complexe du colonisé « . Tout ce qui vient de la France n’est pas forcément » magnifique « . Tout ce que dit la France n’est pas, non plus, » parole d’évangile « .
Alger a décidé en toute souveraineté d’interdire à deux journalistes de fouler son sol. De » couvrir » cette visite officielle de haut niveau. Maintenant que le sort est jeté, et que les répliques les plus sordides ont commencé à fuser outremer, je ne veux même pas m’appesantir sur le fait qu’il pourrait y avoir atteinte à la liberté de la presse. Les décideurs algériens sont forcément au courant de choses qu’ils ne peuvent pas f o r c é m e n t révéler au grand jour, sous peine de mettre en péril la sécurité publique. Valls, lui, a foulé aux pieds les convenances et le respect dû à ses hôtes en rendant publiques ses états d’âme et ses intentions, avant même d’avoir foulé le sol algérien.
Cette inélégante attitude trahit la peur-panique de ce » présidentiable » de la presse hexagonale. J’ose espérer qu’Abdelmalek Sellal, qui n’a pas besoin de le dire de manière prématuré sur les réseaux sociaux, saura mettre les points sur les » I » et expliquer à cet encombrant hôte que l’Algérie est indépendante depuis plus d’un demi-siècle. Après tout, l’Algérie ne doit rien à personne. Et encore moins à la France, ancienne puissance coloniale. Ce sont certains de nos juteux contrats qui ont permis à des entreprises hexagonales en faillite de renflouer leurs caisses, de sauver des dizaines de milliers d’emplois et d’éviter de sévères frondes sociales aux dirigeants de ce pays. En revanche, si le Maroc bénéficie d’investissements pharaoniques, nous n’avons droit qu’à de vulgaires lots à titre de compensation. De petites unités de montage de véhicules fabriqués ailleurs. Avec cela, c’est également la France qui vole systématiquement au secours du Maroc dans sa politique criminelle et colonialiste. N’était ce soutien, il y a belle lurette que le Sahara Occidental aurait recouvré son indépendance. Alger, forcément » profondément désolée » par cette attitude, aura toutes les bonnes raisons de l’évoquer en toute » franchise » et » amitié « . A bon entendeur…