Moroccoleaks : Complots marocains contre la RASD en Afrique (IV)

Royaume du Maroc
Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération
Direction des Affaires Africaines
Rabat, le 22 avril 2013
Note
A
lattention de Monsieur le Ministre
Objet : Réflexion sur la stratégie du Maroc à légard de lAfrique
Le Maroc a toujours entretenu des rapports séculaires et profonds avec ses voisins d’Afrique subsaharienne. La vague des indépendances des années 1960, a permis au Maroc de confirmer son leadership africain en abritant la Conférence de Casablanca qui a donné naissance à lOUA.
Le Maroc sest retiré, en 1984, de lOUA qui avait admis en son sein la prétendue « rasd » en violation de sa propre Charte.
Ce retrait du Maroc a marqué, cependant, un véritable tournant dans sa politique africaine et lui a permis détablir un vaste maillage diplomatique bilatéral en Afrique et remporter de nombreux succès politiques et économiques. La position de ces pays vis-à-vis de la question du Sahara a constitué un point central dans lattitude du Maroc.
Lengagement du Maroc envers son Continent dappartenance a reflété sa foi en une Afrique forte de ses richesses et potentialités et une Afrique tournée vers lavenir. Cet engagement se traduit aujourdhui par lexistence de liens économiques, commerciaux, culturels et humains de plus en plus denses. Il se traduit aussi par la présence de plus en plus importante des entreprises marocaines en Afrique.
Le Maroc qui ne dispose, cependant, que de 24 Ambassades en Afrique, dont 16 en Afrique de lOuest et Centrale et seulement 6 en Afrique de lEst et Australe, détient le réseau le plus faible par rapport aux pays du même niveau (Algérie 30, Afrique du Sud 39, Nigéria 38 et Egypte 38). La présence diplomatique se concentre largement dans les pays francophones (14 Ambassades), au détriment des pays anglophones (5 Ambassades). Le Maroc est quasi absent de lAfrique australe et orientale, six Ambassades pour 23 pays, carence à laquelle il serait souhaitable de remédier.
Cette sous représentation diplomatique se reflète, également, au niveau des accords conclus avec les pays de lAfrique subsaharienne, où plus des 3/4 des accords sont conclus avec les pays, notamment francophones, de lAfrique de lOuest et lAfrique Centrale.
L’affirmation par Sa Majesté le Roi Mohamed VI depuis Son intronisation de la vocation africaine du Maroc, lengagement dans la nouvelle Constitution du Royaume de 2011 érigeant lAfrique comme priorité de la politique extérieure du Royaume, ainsi que les nombreux acquis du Maroc au cours des vingt dernières années devront être déclinés en une nouvelle stratégie nationale vis-à-vis de lAfrique.
Ceci passera par la mise en valeur des atouts du Maroc en tant que pôle de stabilité et partenaire crédible et les mettre au service de lAfrique pour faire face aux mutations et enjeux de notre continent, économique, politique et de sécurité.
De même, les grands défis qui pèsent sur lAfrique (sécurité, changements climatiques, migration, développement&), le jeu de puissance et dinfluence auquel se prêtent les « puissances locales » africaines, ainsi que les convoitises que suscite lAfrique auprès de puissances étrangères (anciennes et émergentes) « imposent » un renouveau de la présence diplomatique marocaine en Afrique.
Dans ce sens, une évaluation objective de la politique africaine du Maroc laisse apparaître trois niveaux de relations : les pays dAfrique de lOuest et Centrale considérés comme les pays « amis » ou le « pré-carré traditionnel » ; ceux de lAfrique de lEst et Australe considérés comme plutôt « hostiles » et enfin la troisième catégorie qui regroupe les pays dits « fragiles », dont les positions sont globalement influencées par les pays dominants dans chaque région, Algérie, Afrique du Sud, Ethiopie et Nigéria notamment.
Une telle perspective, permettra au Maroc de se repositionner à lavant-garde dun agenda africain moderne et en phase avec les mutations géopolitiques mondiales et de promouvoir sa vision dun partenariat Sud-Sud, agissant et solidaire.
Dans le cadre de ce renouveau diplomatique, le Maroc gagnera à poursuivre sa politique de renforcement des relations bilatérales, tout en linscrivant dans une dynamique sous-régionale comme cadre de référence et vecteur de projection.
Sappuyer sur cette configuration sous-régionale permettra une plus grande efficacité à notre action, dans la mesure où le sous-régional constitue un levier déterminant pour lintégration économique et la pierre angulaire de lédifice institutionnel du Continent.
Compte tenu de ce qui précède, la diplomatie du Maroc en Afrique pourra se poursuivre selon des objectifs appropriés pour chaque « bloc » régional, (i) celui de consolider et renforcer les relations avec les partenaires traditionnels, (ii) celui dassurer une forte présence et plus grande implication dans les pays du Sahel et (iii) celui daméliorer la présence auprès des pays dits « hostiles » qui se répartissent globalement entre lAfrique de lEst et Australe.
I – Consolidation du positionnement du Maroc en Afrique dans son pré-carré traditionnel :
Dans ce cadre, les relations bilatérales privilégiées quentretient le Maroc avec plusieurs pays de lAfrique de lOuest et Centrale, devraient être davantage valorisées et développées.
Létablissement dun nouveau modèle de partenariat bilatéral concernera, en plus des instruments de coopération existants (Commissions Mixtes), de nouveaux cadres ; à savoir les consultations politiques régulières entre les Ministères des Affaires Etrangères, la mise en place de clubs dhommes daffaires et de plateformes des ONG. De même, des mesures daccompagnement pourraient être annoncées (accès préférentiel au marché, facilitation de visas&).
Dans ce cadre, le secteur
privé sera amené à simpliquer davantage et devrait être accom
pagnée par lappareil diplomatique partout en Afrique. Des actions complémentaires pourront être menées par dautres acteurs (élus locaux et parlementaires, société civile..).
Sur cette base, le repositionnement du Maroc en Afrique de lOuest et Centrale pourra être favorisé par le lancement des mesures suivantes :
· Conclusion de nouveaux partenariats bilatéraux avec le Sénégal, la Cote dIvoire, le Cameroun, la Guinée et le Gabon. Dans ce cadre, les relations bilatérales avec la France, pourront servir de modèle, pour instaurer une Réunion de Haut Niveau bilatérale avec ces pays et investir de nouveaux créneaux de coopération, en matière daccès à la Justice, de décentralisation, de parité, dorganisation des partis politiques, dobservation électorale, de protection de lEnfant, de régulation de laudiovisuel&. Dans tous ces domaines, le Maroc est pionnier dans sa coopération avec les instances européennes et pourrait jouer le rôle de « puissance relais » avec lAfrique et de trait dunion pour un rapprochement entre lEurope et lAfrique.
· Renforcement de la présence du Maroc à la CEDEAO, à travers létablissement de coopérations renforcées ciblées, où le Maroc pourra apporter une valeur ajoutée, comme les mécanismes de prévention et de résolution des crises ainsi que la médiation. Cette présence pourra se renforcer davantage par le lancement dun dialogue UMA-CEDEAO. Lors de Discours Sa Majesté le Roi au dernier Sommet CEDEAO de décembre 2012, le Souverain a plaidé en faveur de linstauration de ce dialogue (UMA-CEDEAO) dans une dynamique déquilibre et de renforcement de la coopération sud-sud en Afrique. A linstar de linitiative 5+5, un mécanisme de dialogue et de coopération devra être instauré avec certains pays de ce groupement.
· Conclusion dun accord préférentiel avec lUEMOA. Cet accord, en négociation depuis quelques années, constitue une étape importante pour permettre au Maroc daméliorer sa position politique et économique avec cette organisation régionale, à même de lui permettre de jouer un rôle de locomotive pour les pays de la région.
Plusieurs mesures daccompagnement peuvent être mises au service de cette Stratégie:
· Renforcement des synergies entre les différents acteurs nationaux (institutionnels et économiques), en vue de lélaboration dune stratégie « Afrique » en termes de projection dintérêts économiques et commerciaux et didentification des leviers de croissance des exportations.
· Amélioration de loffre logistique, à travers le renforcement des voies de communication au niveau du transport aérien (imposer Casablanca comme un hub aérien pour toute lAfrique), du transport maritime (mise en place des lignes maritimes et des partenariats groupés entre les ports de Tanger-Med et de Casablanca, et ceux de la façade atlantique du Continent), et au niveau du transport routier (contribuer à la finalisation du pont du fleuve Rosso, liant le Sénégal et la Mauritanie, comme prélude à la conclusion dun accord TIR tripartite).
· La mise en place dune sorte de Conseil stratégique informel pour accompagner la projection dintérêts économiques et commerciaux en Afrique, en y associant les départements ministériels concernés (Finances, Commerce et Industrie, Agriculture, Santé, Enseignement Supérieur), les établissements publics (Maroc Export, Office des Foires, ONEE, OCP, RAM, OFPPT), les représentants du secteur privé (CGEM, Groupement bancaire, grandes entreprises nationales), les universitaires (Centre détudes africaines).
· Etablissement de partenariat nouveau en matière déducation et de formation. Le Maroc accueille plus de 8000 étudiants, dont 6500 boursiers, issus de 42 pays africains dans ses établissements supérieurs. Engager la réflexion pour renforcer davantage cette coopération, dans la perspective du positionnement du Maroc comme un hub universitaire pour lAfrique.
· Un autre domaine aussi important que prioritaire, est celui de linstauration dun dialogue qui vise la protection de lintégrité religieuse en Afrique de lOuest, face à la montée du radicalisme religieux et du chiisme.
· Entreprendre des actions concrètes au niveau culturel de façon à permettre au Maroc de devenir une place incontournable dans la promotion et le développement de lart africain. Ressusciter le Festival des Arts Africains, dont lunique édition a eu lieu à Alger dans les années 1970, sera une occasion pour le Maroc de mettre en valeur son identité et son histoire africaines, mais également dattirer les intellectuels et artistes africains. Il serait également judicieux de promouvoir le concept de consacrer une « place » à lAfrique dans tous les festivals de notre pays. Dans ce sens, lidée de la création dun prix pour le film africain dans le Festival international du Cinéma de Marrakech, pourra avoir un grand retentissement.
II – Définition dune nouvelle stratégie de coopération avec les pays du Sahel
Limportance de létablissement dune nouvelle stratégie du Maroc envers les pays du Sahel se justifie à plus dun titre. Linstabilité de cette zone pourra engendrer des conséquences directes sur la sécurité du Maroc. Autre dimension importante, consiste en labsence dengagement clair dans le cadre de lUMA envers cette région, ce qui nécessite de la part du Maroc, une réaction et anticipation à travers la mise en place dactions de coopération conséquentes et adaptées.
Tout en sinspirant de lapproche adoptée vis-vis de lAfrique de lOuest, la mise en oeuvre de cette stratégie qui pourra sappuyer sur une approche intégrée et ouverte, dans lobjectif de contribuer à la promotion de la sécurité, la stabilité et le développement. Ce qui devra se traduire par le renforcement dune part, de la coopération avec les pays prioritaires de la sous région, en loccurrence le Mali, le Niger et la République de lAfrique Central et, dautre part, de lorganisation de la CENSAD, comme vecteur dintégration régionale.
III – Lamélioration de limage et le développement de la coopération avec les pays « hostiles »
Dans ce cadre, laction du Maroc pourra sarticuler autour de plusieurs axes dont lobjectif dasseoir la confiance et corriger la perception négative sur le Maroc. Une telle perspective passe par la mise en oeuvre de certaines actions fondamentales, comme louverture dAmbassades auprès de ces pays, léchange de visites de haut niveau et la multiplication des soutiens dans les foras internationaux.
Dans cette perspective, il serait utile de renforcer la présence diplomatique en Afrique de lEst et Australe, à travers louverture de nouvelles Ambassades auprès de la Namibie, du Botswana et de la Zambie (Afrique Australe) et de la Tanzanie, du Moza
mbique et du Malawi (Afrique de lEst).
Parallèlement à cette approche sous-régionale, le renouveau de laction diplomatique envers lAfrique pourrait englober prioritairement les initiatives suivantes :
· Au niveau multilatéral, le Maroc devra sappuyer sur son expertise pour jouer un rôle davant-garde au service des intérêts africains. Lattitude du Maroc depuis son entrée au Conseil de Sécurité en janvier 2012, pour faire valoir les intérêts africains au sein de cette enceinte (Conférence ministérielle sur le Mali en décembre 2012), représente une illustration supplémentaire du rôle que le Maroc est capable de jouer.
· Au niveau des groupes africains dans les grandes capitales, nos Ambassades peuvent être instruites pour y jouer un rôle actif et dynamique. Une lettre de cadrage sera soumise à lappréciation de Monsieur le Ministre, pour être transmise à nos Ambassades concernées.
· Renforcement des initiatives marocaines en Afrique, notamment, celles qui ont consisté à donner accès libre au marché marocain pour les produits originaires des PMA africains et à lannulation de la dette de ce groupe de pays contractée auprès de notre pays.
· Sappuyer sur la coopération triangulaire, en mettant le savoir faire du Maroc au service des pays africains, grâce au concours des bailleurs de fonds internationaux, bilatéraux et multilatéraux.
Lensemble de ces préalables devra sinscrire dans une stratégie qui sappuie sur les acquis accumulés avec des pays importants, comme le Kenya et sur les contradictions qui existent entre les pays dits « hostiles », comme lAngola qui cherche à sémanciper en tant que puissance régionale en dehors la prépondérance sud-africaine en Afrique Australe.
Des actions de sensibilisation pourront être amorcées envers ces pays, via nos Missions permanentes auprès des organisations internationales (New York, Genève, Nairobi, Addis-Abeba, Bruxelles, Vienne), ou par nos Ambassades dans les grandes capitales (Paris, Londres, Washington, Pékin, Moscou) ou par nos Ambassades dans les pays de leur voisinage.
Cette stratégie visera à « casser » les alliances, dans le sens où les blocs de pays dits « hostiles » ne sont pas homogènes et les raisons qui animent leurs positions envers notre pays sont loin de partager les mêmes motivations, qui varient entre la méconnaissance, lhostilité, lhéritage politique&
A cet égard, létablissement dune liste de pays cibles prioritaires envers lesquels des actions de rapprochement et de coopération seront engagées, est nécessaire.
Pour les relations avec lAngola, il serait tout indiqué détablir une stratégie qui sappuie sur tous les leviers à la disposition du Maroc. Les bonnes relations du Maroc avec le Portugal, pourront servir de relais pour un renforcement des relations avec lAngola et la réactivation de la demande dadhésion du Maroc à la CPLP, Communauté des pays de langue portugaise, pourra servir comme vecteur pour sapprocher de ses pays membres, dont lAngola la Guinée-Bissau, Sao Tomé et principe et le Mozambique.
Dautres actions, peuvent être engagées dans lobjectif de casser laxe Alger-Abuja-Pretoria, en sappuyant sur la diplomatie parallèle parlementaire et des partis politiques et en investissant les réseaux informels dinfluence et de lobbying, notamment, vis-à-vis de lAfrique du Sud qui cherche à simposer comme puissance régionale africaine. Laction envers ce pays devra, en effet, être engagée dans lobjectif dun rééquilibrage de ses relations avec les pays dAfrique du Nord, en imposant le Maroc en tant que pole de puissance et partenaire crédible et explorant de nouvelles pistes de coopération où le Maroc dispose datouts reconnus, en économie verte, finances, télécoms&

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