France : Pas de trêve pour Macron


Les Français recourent à nouveau à des mobilisations massives pour tenter d’arrêter les hausses d’impôts ou rejeter les réformes législatives.

Des protestations des « gilets jaunes »’ aux récentes manifestations contre la loi globale sur la sécurité, en passant par les grèves des transports et les mobilisations contre la réforme des retraites, la rue n’a pas donné de répit au président français, Emmanuel Macron, dans les trois ans et sept mois qu’il a passés à l’Elysée.

À l’automne 2018 et une bonne partie de 2019, le mouvement des « gilets jaunes »’ a mis le gouvernement en échec avec ses manifestations, pour la plupart très violentes. Ce mouvement social sans structure, sans idéologie claire et sans dirigeants, organisé à travers les réseaux sociaux, est né dans les ronds-points de la France rurale, s’est répandu dans tout le pays et a mis le feu aux Champs-Elysées à Paris avec ses concentrations.

Les « gilets jaunes » – baptisés ainsi parce que les manifestants protestaient avec ces vêtements fluorescents qu’il est obligatoire de porter à l’intérieur de la voiture et à porter en cas d’accident de la circulation – incarnaient l’épuisement des classes moyennes appauvries face aux mesures imposées par les élites de Paris. Ils ont rassemblé 287000 personnes dans toute la France le 17 novembre 2018, date de la première grande manifestation contre la hausse des prix des carburants.

Macron, soumis semaine après semaine à la pression de la rue, a fini par céder aux «gilets jaunes» et suspendu la hausse de la taxe sur le carburant. Cependant, le mouvement a continué, avec plus ou moins d’intensité, avec ses protestations jusqu’à ce qu’il s’essouffle.

Un an après cette révolte, les rues ont de nouveau défié Macron avec des grèves dans les transports publics et des manifestations contre la réforme des retraites à travers le pays. Les syndicats se sont mobilisés. Plus de 800000 personnes ont réclamé le 5 décembre 2019 le retrait de la modification controversée des conditions de retraite.

Lors de cette mobilisation, la France a battu son record avec 51 jours consécutifs de grève dans les transports publics, la plus longue grève depuis mai 68.

Macron a été contraint par la crise sanitaire du Covid-19 de reporter sine die la réforme des retraites, approuvée en mars en première lecture par l’Assemblée nationale treize jours avant le premier verrouillage du coronavirus, mais le projet n’est pas enterré .

Le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, a déclaré il y a quelques jours que c’était “une priorité absolue”. Mais Macron ne le remettra pas sur la table tant que la crise sanitaire ne sera pas terminée, selon la chaîne de télévision BFMTV. Reste à savoir s’il pourra le passer avant les élections présidentielles de 2022 ou s’il sortira à nouveau dans la rue et sera contraint de le retirer.

Réforme des retraites

Le gouvernement veut mettre fin au système de retraite complexe en France, en fusionnant les 42 régimes actuels en un seul. Il vise à établir un système universel dans lequel, pour chaque euro coté, vous avez droit à la même pension.

Macron cherche ainsi à mettre fin aux régimes particuliers qui permettent, par exemple, aux travailleurs de la compagnie ferroviaire SNCF et du métro parisien, de prendre leur retraite plus tôt ou dans de meilleures conditions que les autres travailleurs français. Pour cette raison, ces salariés sont ceux qui se sont le plus mobilisés l’an dernier contre la réforme.

Les citoyens sont retournés dans la rue cet automne pour protester cette fois contre le projet de loi sur la sécurité mondiale. La «marche des libertés» a mobilisé le 28 novembre dans toute la France 500 000 personnes, selon les organisateurs, soit 133 000 personnes, selon le ministère de l’Intérieur. Il y a eu de violents affrontements entre la police et les manifestants.

Ses organisateurs demandent le retrait du projet de loi, notamment l’article 24, qui prévoit de limiter la diffusion d’images de policiers et de gendarmes dans l’exercice de leurs fonctions. Ses détracteurs estiment qu’il favorisera l’impunité et limitera la liberté de la presse.

Le texte sera examiné en janvier par le Sénat. Les partis qui composent la majorité parlementaire à l’Assemblée nationale ont proposé de réécrire l’article 24 à son retour à la chambre basse, compte tenu du rejet qu’il a suscité dans une grande partie de la société française.

La violence obscurcit la manifestation contre la loi sur la sécurité mondiale
Les Français sont revenus dans la rue hier pour protester dans 90 villes contre le projet de loi sur la sécurité mondiale, une norme qui, selon eux, favorisera l’impunité de la police et limitera la liberté de la presse.

A Paris, la violence a assombri la manifestation, avec des affrontements entre la police et les manifestants les plus radicaux. Selon la chaîne de télévision BFMTV, entre 400 et 500 personnes violentes se sont infiltrées dans la manifestation parisienne pour la faire exploser. Les «black blocs» ont tiré des projectiles sur les agents de sécurité, dressé des barricades et provoqué des destructions le long de l’avenue Gambetta: incendies de voitures et de motos, brisant du mobilier urbain et brisant des vitrines. Ils ont également organisé des altercations sur la Plaza de la República. Les forces de l’ordre ont répondu par des accusations de police et ont tiré des gaz lacrymogènes pour tenter de disperser les manifestants les plus violents. Enfin, une trentaine de personnes ont été arrêtées dans la capitale.

«Stop à la loi sur la sécurité mondiale», «Sécurité mondiale = insécurité totale», «Impunité policière» et «Macron laisse la reconnaissance faciale aux Chinois», lisent certaines des banderoles portées par les manifestants à Paris. La marche exigeait la démission du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, et du préfet de la police parisienne, Didier Lallement, en plus du retrait total du projet de loi, et pas seulement de l’article 24 controversé.

«C’est une loi qui restreint vraiment nos libertés. Nous n’allons pas pouvoir enregistrer les forces de l’ordre ou diffuser les images », a expliqué Tiphaine, qui portait une banderole qui disait« Impunité, fraternité, état policier ». Cette jeune femme considère qu’il est important que les journalistes et les citoyens puissent enregistrer les policiers afin de documenter les violences policières.

El Norte de Castilla, 5 déc 2020

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