Guerguerat 10 années après Gdeim Izik ! La mobilisation des Sahraouis pour l’autodétermination et l’indépendance ne faiblit pas, elle a pris de court stratèges marocains et internationaux. La présence des civils sahraouis au lieu-dit de Guerguerat, capable de bloquer la circulation entre Sahara occidental et Mauritanie, a été décisive : l’armée marocaine a dès lors pris le risque d’ouvrir de nouvelles brèches dans le mur de défense, violant le cessezle-feu signé en 1991.
À l’extrême sud-ouest du Sahara occidental, la bande de quelques kilomètres de large entre le mur marocain et la frontière mauritanienne, secteur démilitarisé placé sous contrôle du Front Polisario selon les termes de l’accord de cessez-le-feu, est utilisée depuis plusieurs années par le Maroc pour assurer une liaison routière vers la Mauritanie et l’Afrique sahélienne. Il ne suffit pas au Royaume alaouite d’occuper le territoire du Sahara occidental, il faut que celui-ci lui rapporte et lui permette circulation et business… Et la mission de paix de l’ONU, la MINURSO, a adopté en octobre un rôle qui n’était pas prévu dans son mandat : la protection du trafic routier au Sahara occidental !
La décision de réagir au coup de force marocain ce 13 novembre et de reprendre la guerre, seule solution désormais pour faire valoir leur droit, a été ressentie par tous les Sahraouis, où qu’ils se trouvent, comme leur dignité enfin réaffirmée. En effet, le règlement politique passant par un référendum d’autodétermination, défendu unanimement par le Front Polisario, est empêché depuis 1991 par les autorités marocaines qui craignent que le choix de l’indépendance l’emporte.
L’engagement militaire de l’APLS (Armée Populaire de Libération Sahraouie), présente dès le lendemain aux points de contrôle et d’artillerie du mur marocain, a de suite entraîné la mobilisation de tous. Dans les camps de réfugiés en Algérie, les hommes se sont très vite engagés, tellement nombreux que beaucoup d’entre eux n’ont pu encore intégrer les Écoles militaires ; en Europe, la diaspora a manifesté, s’est rassemblée, impressionnante en Espagne mais aussi en France, et en Allemagne ; c’est surtout au Sahara occupé, à El Aïoun, à Dahkla, que les Sahraouis sont sortis, bloquant pour certains leur quartier pour se protéger de la police. L’heure est désormais à la répression, mais la résistance à l’occupation va trouver certainement de nouvelles formes.
De leur côté, les autorités marocaines réagissent comme en 1976 : pour elles, rien ne se passe sur le terrain, les colonnes de l’APLS qui depuis quatre semaines affaiblissent les défenses du mur marocain n’existent pas, ne sont pas en capacité d’affronter les FAR (les Forces Armées Royales marocaines). La Monarchie alaouite est-elle en mesure de rejouer le scénario de 1976 en niant l’existence de son adversaire, et celle de ses prisonniers de guerre ? 2020 n’est pas 1976, la société marocaine va-t-elle à nouveau accepter ces mensonges d’État, le Conseil de sécurité va-t-il se laisser convaincre ?
Peut-on au contraire espérer que les membres du Conseil de Sécurité et ceux de l’Union européenne prennent enfin conscience que la volonté d’indépendance du peuple sahraoui est intacte et capable de résister au temps ? Autour de la RASD, république en exil, s’est construite une citoyenneté sahraouie capable de tout affronter pour gagner son indépendance.
Aussi, il est temps que la Communauté internationale s’y engage résolument et organise immédiatement un référendum d’autodétermination avec toutes les garanties démocratiques qui s’imposent. Cela concerne d’abord notre pays, qui appelle à la désignation d’un nouvel envoyé personnel et se dit prêt à participer à la réussite d’un prochain processus politique. L’Espagne aussi, étant donné son statut de puissance administrante de jure du territoire non autonome du Sahara occidental. La démocratie et le droit plutôt que la guerre, n’est-ce pas l’ardente obligation de la Communauté internationale ?
Régine Villemont, 16 décembre 2020
Sahara Info, Numéro 181
Association des Amis de la République Arabe Sahraouie Démocratique Juillet -décembre 2020 – Numéro 181
Tags : Sahara Occidental, Maroc, Front Polisario, Western Sahara,
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