Les gestes de bonne volonté de la part de la France, s’agissant de son très lourd passif colonial en Algérie, se multiplient. A l’initiative essentiellement du Président français, Emmanuel Macron, la France ne cesse de faire des pas en avant en vue d’apurer le dossier relatif à la mémoire entre les deux pays.
Par Kamel Hamed
Ainsi quelques jours seulement après la reconnaissance par l’État français de la torture et l’assassinat du militant nationaliste, Ali Boumendjel, le Président français vient d’annoncer sa décision de faciliter l’accès aux archives classifiées de plus de 50 ans couvertes par le “secret défense”, notamment celles relatives à la Guerre d’indépendance de l’Algérie.
Selon un communiqué de l’Elysée, cité par l’AFP, Emmanuel Macron “a pris la décision de permettre aux services d’archives de procéder aux déclassifications des documents couverts par le secret de la défense nationale (…) jusqu’aux dossiers de l’année 1970 incluse”, a précisé l’Élysée dans le même communiqué.
“Cette décision sera de nature à écourter sensiblement les délais d’attente liés à la procédure de déclassification, s’agissant notamment des documents relatifs à la Guerre d’Algérie”, a ajouté le communiqué. Autant dire qu’il s’agit de la levée d’un grand écueil qui jusque-là entravait les recherches des historiens sur la période coloniale et, notamment, durant la Guerre de libération nationale où l’armée française s’était singulièrement distinguée par des actes criminels abominables à l’encontre des populations en général et des moudjahidine en particulier. Dans leur sale besogne, et à l’effet de mettre fin à la révolution, les troupes coloniales se sont adonnées à de graves atteintes aux droits de l’Homme. En levant l’interdiction d’accès aux archives, il est indéniable que le Président français poursuit l’application de sa feuille de route consistant en le règlement des dossiers en suspens entre les deux pays à même d’aplanir leurs divergences sur la question mémorielle. Preuve en est, il y a juste quelques jours, soit au début du mois de mars en cours, le Président français a reçu la famille du martyr Ali Boumendjel, en reconnaissant que l’État français a torturé et assassiné le militant algérien lors de la Guerre de libération nationale, en 1957 plus précisément. Jusque-là, pour rappel, la version officielle française consistait à dire que ce militant s’est suicidé lors de sa détention. Un mensonge qui vient de tomber au profit de la vérité et qui confirme les exactions de l’armée coloniale. Cette cascade de gestes intervient, estiment les observateurs, dans le cadre de la mise en application des recommandations de l’historien Benjamin Stora.
Ce dernier a, dans un rapport demandé par le Président Français, émis plusieurs recommandations.
En effet ce rapport de presque 150 pages, qui contient un peu plus de 22 propositions dont, notamment, la reconnaissance par l’État français de l’assassinat de l’avocat et militant nationaliste Ali Boumendjel, la restitution du canon BabaMerzoug ou la réalisation d’une stèle à l’effigie de l’émir Abdelkader. Mais ce rapport reste loin de répondre aux attentes des Algériens qui exigent la repentance de la France pour l’ensemble de ses crimes et la présentation des excuses au peuple algérien. Ce que refuse catégoriquement la France pour le moment. Il n’en reste pas moins qu’à travers ces gestes, certes assez symboliques, le Président français confirme sa disponibilité à aller de l’avant dans la relation entre les deux pays. Une relation par trop compliquée du fait, notamment, du lourd dossier de l’histoire. Emmanuel Macron jouit cependant de préjugés favorables comme l’attestent les propos du Président Abdelmadjid Tebboune. Le président Tebboune a estimé, à plusieurs reprises, que le Président français, Emmanuel Macron, est quelqu’un de très “honnête et de propre historiquement”. Mais le Président algérien sait, comme il l’a dit publiquement, que Macron fait face aussi à la résistance des lobbies, assez puissants du reste, qui n’admettent pas encore que l’Algérie est indépendante et souveraine.
Le Midi Libre, 11 mars 2021
Tags : Algérie, France, Guerre d’Algérie, Archives, Colonisation, crimes coloniaux,
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