L’Algérie face au triangle hostile

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Les nostalgiques de l’Algérie française, le makhzen et l’entité sioniste
Par Mahmoud Chabane*
Notre pays a-t-il des ennemis intérieurs et extérieurs? Cette question lancinante, posée de manière abrupte, soulève un problème sémantique; que met-on dans le mot ennemi? Il faut reconnaître, qu’un pays comme le nôtre, qui a livré de manière continue et avec des moyens dérisoires, pendant 132 ans, une guerre de Libération nationale contre l’empire colonial français, ce qui n’est pas rien, regorgeant de richesses naturelles et minières insoupçonnées, bonifié par sa position géographique et son aura à l’international, ne laisse pas indiffèrent. Et c’est le moins que l’on puisse dire. 
Notre pays a suscité et continue de susciter, indéniablement, des convoitises, des appétits, des jalousies mais aussi de l’admiration pour sa grandiose Révolution.
Il convient, donc, de ne pas oublier que la France coloniale n’a jamais quitté réellement ses anciennes colonies. Elle a juste opéré un repli tactique, (les guerres coloniales coûtent financièrement, humainement, politiquement et diplomatiquement, trop cher), pour confier la gestion des affaires courantes, du maintien de l’ordre public… à des dirigeants croupions qu’elle aura désignés, les questions économiques relevant, bien entendu, de la compétence de la banque centrale française.
La France néocoloniale agit en maître absolu dans ces pays, sous couvert de France-Afrique, pour piller les richesses naturelles et minières, approvisionner son économie et disposer d’un marché pour ses produits manufacturés et son armement.
Dans le cas de notre pays, hautement stratégique, renfermant des ressources naturelles et minières insoupçonnées, que la France impériale voulait garder à tout prix, la guerre de Libération nationale menée par le peuple algérien, la voie tracée par les résolutions du congrès de la Soummam, confortée et approfondie par les chartes de Tripoli, d’Alger et de 1976, suivie tant bien que mal par les dirigeants en charge de la gestion de l’État, a sérieusement contrarié les prévisions des pouvoirs politiques français qui pariaient sur l’incapacité des indigènes algériens à fonder un État.
Il est utile de se rappeler que les autorités politiques françaises avaient pris toutes les dispositions nécessaires pour cela. Pillages de toute sorte, départ massif des personnels (la valise ou le cercueil, slogan de l’OAS) dans le but de paralyser le pays et de créer le chaos conduisant inéluctablement à la guerre civile, le transfert des archives, les caisses vidées…
Les coups bas du Royaume chérifien
Il faut garder à l’esprit que les pouvoirs politiques français, quelle que soit leur obédience, nonobstant les habillages diplomatiques et les déclarations plus ou moins édulcorées, voire avenantes, n’ont pas digéré et ne sont pas près de le faire, la défaite la plus humiliante de la puissance impériale que lui ont infligée ces indigènes.
Ce qui est probablement le plus insupportable, frustrant et rageant pour les partisans de l’Algérie française, c’est le fait que toutes leurs attentes ont été contrariées. En effet, le pays n’avait pas sombré dans une sanglante guerre civile malgré toutes les mines disséminées par la France coloniale, avant son retrait.
Il s’est engagé tant bien que mal sur la voie de la reconstruction et de la récupération de ses richesses naturelles par le biais des nationalisations, et devenu en une dizaine d’année un leader respecté et écouté du tiers monde, et s’est montré jaloux de son indépendance et de sa souveraineté. La France néocoloniale n’a jamais cessé, comme elle fait toujours dans les anciennes colonies gardées sous son giron, d’entraver les efforts de développement et d’émancipation économique, sociale et politique entrepris par notre pays.
Pour illustrer ceci, il suffit de se remémorer la campagne féroce anti-Algérie et Algériens, menée tous azimuts par les médias français au lendemain de la nationalisation des hydrocarbures. Les pouvoirs politiques français avaient mis en branle des moyens énormes pour saborder cette décision souveraine de notre pays et coalisé leurs alliés pour imposer un blocus et faire courber l’échine, sans succès, à un peuple fier qui vivait encore dans l’euphorie de sa Révolution et la fidélité à ses martyrs.
Il faut garder en mémoire le « il faut» prononcé solennellement sous forme d’injonction par le président français François Mitterrand, pour ne pas le nommer, ordonnant aux autorités algériennes de l’époque de poursuivre le processus électoral jusqu’à son terme en sachant que le pays, qu’il a perdu à jamais, allait tomber dans l’escarcelle des islamistes. Cette injonction, restée sans effet, fut suivie immédiatement par la mise en place, par la France et ses alliés, d’un embargo total qui a perduré pendant les années du terrorisme avec en prime un plan d’ajustement structurel qui avait induit la mise sous tutelle du FMI de notre pays avec les conséquences désastreuses que l’on sait.
Comme toujours, les médias s’emparaient du sujet pour déverser leurs flots de contrevérités et d’allégations mensongères, dont les plus célèbres le «pétrole algérien est rouge», «pas de pétrole pas de boulot» et le «qui-tue-qui». On a souvent entendu des journalistes et autres spécialistes et experts de service, sur les plateaux des médias français, soutenir, après près de 60 années d’indépendance, mordicus et avec un aplomb qui trahit leur frustration, que l’Algérie est une création française. Ils se gardent bien évidemment, plus par militantisme que par paresse intellectuelle ou incompétence, de préciser que tout ce qui se faisait dans ces trois départements français, c’était pour les français essentiellement. Les indigènes, dont le sort était scellé par le code de l’indigénat, sont traités, quand ils ne sont pas auxiliaires de la colonisation, en esclaves.
Le Royaume chérifien, quant à lui, a choisi de faire dans la lâcheté, sa marque de fabrique, pour porter des coups bas à notre pays. En 1847, l’Émir Abdelkader, qui menait une guerre contre l’envahisseur a été trahi par le roi du Maroc. En 1956, l’avion en partance du Maroc qui transportait nos dirigeants pour une réunion en Tunisie, détourné par l’armée française n’a pas livré tous les secrets sur l’implication du prince Hassan. En 1963, l’agression (connue sous le nom de guerre des sables), de notre pays, est perpétrée par Hassan II, avec l’aide logistique de la France et d’Israël. Il est utile de savoir que le Maroc est placé sous protectorat français.
Il faut préciser que le moment choisi par le roi Hassan II et ses soutiens pour agresser lâchement notre pays convalescent, dévasté et ruiné par la France coloniale leur assurait, en théorie, une victoire éclair. Cette erreur d’appréciation a permis au peuple algérien, mobilisé spontanément aux côtés de sa glorieuse armée, de leur infliger une mémorable humiliation et de mettre un terme aux velléités du roi du Maroc d’étendre son royaume à l’Est.
Des chefs terroristes logés au Maroc
À cela, s’est ajoutée la remise en cause unilatérale de l’accord tripartite (Maroc, Maurétanie et Algérie), sur la décolonisation du Sahara occidental. À défaut de s’étendre à l’Est, le roi du Maroc décida de s’étendre au Sud en envahissant lâchement le Sahara occidental. Et ce n’est pas tout! Le Maroc a accueilli des chefs terroristes et octroyé des aides multiformes à des mouvements terroristes et séparatistes. Il convient de préciser que c’est suite aux attentats terroristes, qui avaient pour cible Marrakech, et aux accusations mensongères portées contre notre pays, que les autorités algériennes avaient décidé, en 1994, de fermer la frontière. Et pour couronner le tout, le point d’orgue de cette lâcheté a été l’hébergement de l’État sioniste d’Israël à nos frontières pour lui permettre de mener contre notre pays sa guerre de 4e génération et assouvir sa soif de vengeance.
De fait, l’État sioniste est devenu notre indésirable voisin, lui qui a déclaré, sans ambages, que l’Algérie est un pays ennemi, lui qui n’oublie et n’oubliera jamais le rôle joué par l’Algérie pendant les guerres de 1967 et 1973, les positions courageuses anticolonialistes défendues avec constance et détermination par notre diplomatie, la création du front du refus et de la fermeté à l’initiative de notre pays au lendemain du voyage du président égyptien en Israël, décidé à brader la cause palestinienne. Il faut noter, aussi, que les pays qui constituaient ce front (Libye, Yémen, Irak, Syrie et Algérie), ont été déstabilisés. L’Algérie, qui a connu la décennie noire, resterait dans le viseur de l’État sioniste. Et son installation à nos frontières par le roi du Maroc, vassal du sionisme mondial, n’augure rien de bon, situation qui requiert une vigilance accrue. Malgré tout cela, tel un effronté, le roi du Maroc ose, de manière éhontée, dire que nos pays sont des frères!!??
Les ennemis de l’intérieur qui gangrènent notre pays, identifiables à leurs comportements antinationaux, gravitent, tels des charognards, autour des gîtes de corruption, de détournement des biens du peuple, de destruction de notre écosystème, de terres agricoles, de sabotage de notre économie, etc. et bien sûr la traîtrise et la lâcheté.
Le peuple algérien, réputé sobre, a trop souffert physiquement et moralement des affres de la colonisation et de la politique ultra-libérale, mise en branle dès le début des années 1980, qui a généré des disparités criardes entre les zones côtières et les zones de montagne et steppiques.
C’est pourquoi les zones de montagne des Atlas tellien et saharien, quasiment abandonnées durant ces quarante dernières années, requièrent, de toute urgence, une mise à niveau portée par des programmes spéciaux de développement dédiés spécifiquement aux zones de montagne, élaborés avec la participation active des populations concernées et des compétences nationales.
À titre indicatif, ces programmes spéciaux, dont l’objectif central devra être le développement intégré et multisectoriel de ces zones, pourraient s’articuler autour des axes suivants:
– agriculture de montagne (reforestation, protection des berges des barrages, arboriculture fruitière, potagers, pépinières, petits élevages, travaux de DRS, apiculture,…);
– infrastructures: (pistes, bâtiments d’exploitation, écoles, retenues collinaires, bâches à eau…);-tourismes: (randonnées équestres et pédestres, circuits de découverte des cultures et des lieux historiques, aménagement des plans d’eau,…); -Artisanat: (transformation et conservation des produits du terroir, tissage…).
Un poumon économique à valoriser

Pour appuyer cette requête, il me paraît utile de rapporter les propos tenus en avril 1978, lors d’une séance de travail ayant lieu au siège d’une wilaya de l’ouest par le président de la République, qui avait déclaré à l’adresse des responsables locaux, le ton grave que (je cite de mémoire); « Tant que le dernier habitant de l’Ouarsenis, du Djurdjura et des Aurès ne dispose pas de l’électricité, nous devons considérer que nous n’avons pas rempli notre devoir vis-à-vis de ces régions qui ont donné à la Révolution les meilleurs de leurs enfants.» Et ce n’est pas un hasard si les trois premiers plans spéciaux de développement, visant à effacer, ou tout au moins atténuer, les stigmates de la colonisation, décidés et engagés par les pouvoirs publics vers la fin des années 60 ont concerné ces trois régions. 
Hélas, ces programmes spéciaux, élargis par la suite à d’autres régions, ont été, à l’instar des plans quadriennaux de développement, arrêtés et clôturés dès le début des années I980 par l’équipe dirigeante en place. Pour conclure cette modeste contribution, qui nous est dictée par le besoin de briser, un tant soit peu, la culture de l’oubli instillée dans notre société en prenant le soin de rappeler des faits qui ont jalonné notre histoire récente qui, de mon point de vue, éclairent les dramatiques évènements que vient de subir notre pays. 
Et de dire, aussi, que si notre pays, qui a connu, grosso modo, ses libérateurs (1830-1962), ses bâtisseurs (1962-1980), ses accaparateurs (1980-1999) et ses prédateurs (1999-2019), n’a pas sombré dans le chaos que lui prédisaient nos ennemis et autres revanchards. Cela, on le doit à des patriotes sincères, intègres et engagés, respectueux de la chose publique, qui s’interdisent de détruire ce joyau reçu en héritage de nos libérateurs et de compromettre l’avenir. 
Les ignorer, eux qui constituent l’écrasante majorité agissante du peuple algérien, jaloux de leur pays et fiers de son Histoire plusieurs fois millénaire, prêts à tout pour le défendre, pour se focaliser sur une poignée de mercenaires dopés aux discours haineux et quelques subsides que leur verseraient leurs commanditaires, est à considérer comme une injustice à l’égard de tous les patriotes désireux de vivre paisiblement dans ce pays auquel ils sont attachés et pour lequel ils se sont sacrifiés. 
Il reste à espérer le retour sur le terrain, des réparateurs «équipés» de leurs boîtes à outils, de leurs expertises et savoir-faire, décidés résolument à assumer cette mission exaltante et valorisante qui consiste à réparer les dégâts causés à notre pays depuis, au moins une quarantaine d’années, par une faune d’accapareurs, de prédateurs, de pilleurs et de casseurs. 
L’élaboration et la mise en oeuvre des programmes spéciaux de mise à niveau par le développement des zones de montagne est à inscrire comme une priorité nationale…
*Agronome
L’Expression, 26/09/2021
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