Parlement Européen, politique commerciale, PE, UE, droit international, territoires occupés, colonies,
le 8 septembre, la Commission européenne a décidé d’enregistrer une initiative citoyenne européenne intitulée «Assurer la conformité de la politique commerciale commune avec les traités de l’Union européenne ainsi que le respect du droit international».
Les organisateurs de l’initiative appellent la Commission à «proposer des actes juridiques basés sur la politique commerciale commune visant à empêcher les entités juridiques de l’Union tant d’importer des produits originaires de colonies illégales dans des territoires occupés que d’exporter des produits vers ces territoires, afin de préserver l’intégrité du marché intérieur et de ne pas aider ou contribuer au maintien de telles situations illégales.»
La Commission considère cette initiative citoyenne européenne comme recevable sur le plan juridique, car elle remplit les conditions nécessaires à l’enregistrement. Il importe de souligner le fait que cette initiative invite la Commission à présenter une proposition d’acte juridique en vertu de la politique commerciale commune, qui revêt un caractère général et ne cible aucun pays ou territoire spécifique. À ce stade, la Commission n’a pas analysé l’initiative sur le fond.
Par la décision de ce jour, la Commission réévalue l’initiative proposée après avoir reçu des informations supplémentaires de la part des organisateurs et après une décision rendue par le Tribunal sur une décision antérieure de la Commission.
Étapes suivantes
Après l’enregistrement de ce jour, les organisateurs peuvent lancer le processus de collecte des signatures. Si, en l’espace d’un an, une initiative recueille un million de déclarations de soutien provenant d’au moins sept États membres différents, la Commission devra réagir. Elle pourrait décider de faire droit à la demande ou non, mais, dans les deux cas, elle serait tenue de motiver sa décision.
Contexte
L’initiative citoyenne européenne a été instituée par le traité de Lisbonne et conçue pour offrir aux citoyens la possibilité d’influer sur les programmes de travail de la Commission. Elle a été officiellement lancée en avril 2012.
Les conditions de recevabilité sont les suivantes: 1) l’action proposée doit, pour être acceptée, manifestement relever des attributions de la Commission en vertu desquelles elle peut présenter une proposition d’acte juridique, 2) elle ne doit pas être manifestement abusive, fantaisiste ou vexatoire, ni 3) manifestement contraire aux valeurs de l’Union.
Depuis le lancement de l’initiative citoyenne européenne (ICE), la Commission a reçu 107 demandes de lancer une ICE, dont 83 relevaient de domaines dans lesquels elle dispose de la compétence requise pour présenter une proposition législative et ont donc pu être enregistrées.
II
(Actes non législatifs)
DÉCISIONS
DÉCISION D’EXÉCUTION (UE) 2021/1484 DE LA COMMISSION
du 8 septembre 2021
relative à la demande d’enregistrement de l’initiative citoyenne européenne intitulée «Assurer la conformité de la politique commerciale commune avec les traités de l’Union européenne ainsi que le respect du droit international», en application du règlement (UE) 2019/788 du Parlement européen et du Conseil
[notifiée sous le numéro C(2021) 6607]
(Le texte en langue anglaise est le seul faisant foi.)
LA COMMISSION EUROPÉENNE,
vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, vu le règlement (UE) 2019/788 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 relatif à l’initiative citoyenne européenne ( 1 ), et notamment son article 6, paragraphes 2 et 3, considérant ce qui suit:
(1) Une demande d’enregistrement de l’initiative citoyenne européenne intitulée «Assurer la conformité de la politique commerciale commune avec les traités de l’Union européenne ainsi que le respect du droit international» a été présentée à la Commission le 5 juillet 2019.
(2) Le 4 septembre 2019, la Commission a adopté la décision (UE) 2019/1567 ( 2 ) par laquelle l’enregistrement de l’initiative citoyenne était refusé.
(3) Cette décision a fait l’objet d’un recours devant le Tribunal. Dans son arrêt rendu le 12 mai 2021 dans l’affaire T-789/19 ( 3 ), le Tribunal a annulé la décision (UE) 2019/1567 en faisant valoir que la Commission avait manqué à son obligation de motiver suffisamment celle-ci. Elle a notamment omis d’expliciter la raison pour laquelle elle a estimé que seul l’article 215 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) pouvait constituer une base juridique appropriée pour l’acte proposé et pourquoi cet acte ne relevait pas de la politique commerciale commune et, par conséquent, ne pouvait pas être adopté sur la base de l’article 207 du TFUE.
(4) Afin de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt T-789/19, il convient d’adopter une nouvelle décision relative à la demande d’enregistrement de cette initiative citoyenne européenne.
(5) Le règlement (UE) no 211/2011 du Parlement européen et du Conseil ( 4 ), qui était applicable au moment de l’adoption de la décision (UE) 2019/1567, a été abrogé avec effet au 1er janvier 2020 et remplacé par le règlement (UE) 2019/788. Par conséquent, la demande d’enregistrement doit maintenant être évaluée au regard de ce nouveau cadre juridique.
(6) Le 8 juin 2021, la Commission a, conformément à l’article 6, paragraphe 4, du règlement (UE) 2019/788, informé le groupe d’organisateurs de son appréciation selon laquelle les exigences en matière d’enregistrement énoncées à l’article 6, paragraphe 3, points a), d) et e), dudit règlement étaient remplies et l’exigence établie à l’article 6, paragraphe 3, point b), n’était pas applicable. La Commission a invité les organisateurs à clarifier leur initiative car le texte de l’initiative tel que libellé dans la demande du 5 juillet 2019 ne lui permettait pas de conclure que l’exigence prévue à l’article 6, paragraphe 3, point c), était remplie.
(7) Selon l’appréciation préliminaire de la Commission, l’initiative semblait avoir comme objectif l’adoption de mesures restrictives de l’Union (sanctions) et paraîtrait donc relever de l’article 215 du TFUE qui exige, comme condition préalable, que le Conseil adopte une décision conformément au chapitre 2 (Dispositions spécifiques concernant la politique étrangère et de sécurité commune) du titre V du traité sur l’Union européenne. La Commission a expliqué qu’en l’absence de la décision préalable du Conseil, elle ne pouvait pas présenter de proposition et, qu’en tout état de cause, la proposition devrait être faite conjointement avec le haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Elle a en outre indiqué que le texte de l’initiative ne permettait pas de déterminer clairement si son seul objectif était d’imposer une interdiction générale pour tous les produits provenant de colonies illégales dans les territoires occupés ou si d’autres formes de réglementation à la frontière de l’Union étaient également envisagées. Enfin, la Commission a demandé aux organisateurs de préciser si l’initiative était propre à un territoire ou avait pour but d’imposer une interdiction générale sans viser un pays ou territoire particulier.
(8) Le 17 juillet 2021, les organisateurs ont adressé un courrier aux services de la Commission pour préciser les objectifs de leur initiative. Ils ont expliqué qu’ils demandaient «que la politique commerciale de l’UE ne se déroule qu’avec des territoires qui ont une validité légale» et qu’ils souhaitaient «que la politique commerciale de l’UE garantisse qu’il n’y ait pas d’échanges commerciaux avec des territoires occupés illégalement ou acquis illégalement par le recours à la force, précisément en raison des contraintes du droit international».
(9) Le 10 août 2021, une version légèrement modifiée de l’initiative a été soumise à la Commission.
(10) Les objectifs de l’initiative sont formulés comme suit: «Nous demandons une réglementation des transactions commerciales avec les entités de l’occupant établies ou exerçant leurs activités dans les territoires occupés, dans le but d’empêcher les produits qui en sont originaires d’entrer sur le marché de l’UE. La Commission, en sa qualité de gardienne des traités, doit veiller à la cohérence de la politique de l’Union et au respect des droits fondamentaux et du droit international dans tous les domaines du droit de l’Union, y compris la politique commerciale commune. Elle doit proposer des actes juridiques fondés sur la politique commerciale commune visant à empêcher les entités juridiques de l’Union tant d’importer des produits originaires de colonies illégales dans des territoires occupés que d’exporter des produits vers ces territoires, afin de préserver l’intégrité du marché intérieur et de ne pas aider ou contribuer au maintien de telles situations illégales.»
(11) Dans la mesure où la Commission est invitée, par cette initiative, à présenter une proposition d’acte juridique qui devrait garantir que l’Union européenne ne réalise pas de transactions commerciales avec les entités de l’occupant établies ou exerçant leurs activités dans des territoires occupés au regard du droit international, l’initiative consiste à demander une mesure ayant vocation à régir les échanges internationaux de l’Union de manière générale, sans viser un pays ou territoire particulier. Selon une jurisprudence constante, une mesure qui «porte spécifiquement sur les échanges internationaux en ce qu’[elle] est essentiellement destiné[e] à promouvoir, à faciliter ou à régir ces échanges et a des effets directs et immédiats sur ceux-ci» ( 5 ) relève de la politique commerciale commune et devrait être fondée sur l’article 207 du TFUE. À cet égard, il semblerait que la mesure envisagée par l’initiative exigerait l’adoption d’interdictions ou de restrictions à l’importation et à l’exportation vis-à-vis de territoires occupés au regard du droit international. Une telle mesure aurait donc un lien spécifique ( 6 ) avec les échanges internationaux et, partant, entrerait dans le champ d’application de l’article 207 du TFUE même si elle poursuit des objectifs de politique étrangère ( 7 ).
(12) Eu égard aux éclaircissements donnés par les organisateurs dans leur courrier du 17 juillet 2021 et aux légères modifications apportées à l’initiative, la Commission croit comprendre que l’initiative modifiée l’invite à présenter une proposition d’acte juridique sur la base de l’article 207 du traité, qui devrait garantir que l’Union ne réalise pas de transactions commerciales avec les entités de l’occupant établies ou exerçant leurs activités dans des territoires occupés et que, par conséquent, l’initiative consiste à demander une mesure commerciale de nature générale qui ne vise pas un pays ou territoire particulier.
(13) Pour que les signataires potentiels comprennent l’objectif de l’initiative telle qu’enregistrée, le groupe d’organisateurs devrait veiller à ce que les informations détaillées relatives à l’initiative, à publier dans les formulaires figurant à l’annexe III du règlement (UE) 2019/788 ainsi que dans le système central de collecte en ligne ou le système particulier de collecte en ligne, selon le cas, précisent que l’initiative consiste à demander une mesure ayant vocation à régir les échanges internationaux de l’Union de manière générale, sans viser un pays ou territoire particulier.
(14) Compte tenu de ce qui précède, aucune partie de l’initiative n’est manifestement en dehors du cadre des attributions de la Commission en vertu desquelles celle-ci peut présenter une proposition d’acte juridique de l’Union aux fins de l’application des traités, ce qui est conforme à l’article 6, paragraphe 3, point c), du règlement (UE) 2019/788.
(15) Cette conclusion ne préjuge pas de l’appréciation visant à déterminer si les conditions factuelles et matérielles concrètes requises pour que la Commission agisse, y compris le respect du principe de proportionnalité, sont remplies en l’espèce.
(16) Le groupe d’organisateurs a produit des preuves appropriées attestant qu’il satisfait aux exigences énoncées à l’article 5, paragraphes 1 et 2, du règlement (UE) 2019/788 et qu’il a désigné les personnes de contact conformément à l’article 5, paragraphe 3, premier alinéa, dudit règlement.
(17) L’initiative n’est ni manifestement abusive, fantaisiste ou vexatoire, ni manifestement contraire aux valeurs de l’Union telles qu’énoncées à l’article 2 du traité sur l’Union européenne et aux droits consacrés dans la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
(18) En conclusion, pour autant que les objectifs de l’initiative intitulée «Assurer la conformité de la politique commerciale commune avec les traités de l’Union européenne ainsi que le respect du droit international» comportent les informations complémentaires demandées, l’initiative répond à toutes les exigences énoncées à l’article 6, paragraphe 3, du règlement (UE) 2019/788 et devrait donc être enregistrée,
A ADOPTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:
Article premier
L’initiative citoyenne européenne intitulée «Assurer la conformité de la politique commerciale commune avec les traités de l’Union européenne ainsi que le respect du droit international» est enregistrée, moyennant l’indication des informations complémentaires suivantes afférentes aux objectifs de l’initiative: «Par cette initiative, la Commission est donc invitée à présenter une proposition d’acte juridique dans le cadre de la politique commerciale commune qui est de nature générale et ne vise pas un pays ou territoire particulier.»
Le groupe d’organisateurs publie l’initiative, telle qu’enregistrée, dans les formulaires figurant à l’annexe III du règlement (UE) 2019/788 ainsi que dans le système central de collecte en ligne ou le système particulier de collecte en ligne, selon le cas.
La Commission publie les mêmes informations sur la portée de l’enregistrement de l’initiative dans le registre.
Article 2
Le groupe d’organisateurs de l’initiative citoyenne européenne intitulée «Assurer la conformité de la politique commerciale commune avec les traités de l’Union européenne ainsi que le respect du droit international», représentés par MM. Tom MOERENHOUT et Giovanni FASSINA, faisant office de personnes de contact, est destinataire de la présente décision.
Fait à Bruxelles, le 8 septembre 2021.
Par la Commission
Věra JOUROVÁ
Vice-présidente
( 1 ) JO L 130 du 17.5.2019, p. 55.
( 2 ) Décision (UE) 2019/1567 de la Commission du 4 septembre 2019 relative à la proposition d’initiative citoyenne intitulée «Assurer la conformité de la politique commerciale commune avec les traités de l’Union européenne ainsi que le respect du droit international» (JO L 241 du 19.9.2019, p. 12).
( 3 ) Arrêt du Tribunal du 12 mai 2021, Tom Moerenhout e.a./Commission européenne, T-789/19, ECLI:EU:T:2021:260.
( 4 ) Règlement (UE) no 211/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2011 relatif à l’initiative citoyenne (JO L 65 du 11.3.2011, p. 1).
( 5 ) Arrêts de la Cour de justice du 22 octobre 2013, Commission/Conseil, C-137/12, ECLI:EU:C:2013:675, point 57, et du 18 juillet 2013, Daiichi Sankyo, C-414/11, ECLI:EU:C:2013:520, point 51.
( 6 ) Avis 2/15 du 16 mai 2017, accord de libre-échange avec Singapour, ECLI:EU:C:2017:376, point 37.
( 7 ) Arrêts de la Cour de justice du 17 octobre 1995, Werner, C-70/94, ECLI:EU:C:1995:328, point 10, et du 17 octobre 1995, Leifer, C-83/94, ECLI:EU:C:1995:329, point 10.
Source: Parlement Européen, 16/09/2021
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