Au Sahara, les forces du fait accompli mènent le jeu

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A la fin de la Seconde guerre mondiale et à la création de l’ONU, plus de 800 millions d’habitants étaient encore sous domination de puissances étrangères

Par Nadir Bacha

A la fin de la Seconde guerre mondiale et à la création de l’ONU, plus de 800 millions d’habitants étaient encore sous domination de puissances étrangères. Autrement dit, le tiers de la population mondiale vivait encore sous le joug de certains pays industrialisés, comme la France, le Royaume-Uni, l’Espagne, le Portugal, les Etats-Unis et, à un degré moindre, la Belgique, pour le cas du Congo, avec la France.

Selon les estimations des experts des Nations unies, un peu plus de 2 millions demeurent dans le cas de la colonisation classique, à travers moins d’une vingtaine de territoires dans le monde. Tel celui des îles Samoa et de Guam, par exemple, sous la tutelle des Etats-Unis. De la Nouvelle-Calédonie et de Gibraltar, sous celles de la France et du Royaume-Uni. Tandis que le Sahara occidental est déclaré (par l’ONU) sous aucune tutelle. Quand la Palestine, Ceuta et Melilla – enclaves espagnoles dans les territoires marocains- ne sont pas mentionnées.

La Charte des Nations unies, dans le cadre de la gestion des territoires « litigieux», a établi un régime international de tutelle, stipulé dans les articles de 75 à 85 au chapitre XII, ainsi qu’un Conseil de tutelle (Chapitre XII, articles de 86 à 91) dans le but de surveiller certains territoires désignés par l’appellation «territoires sous tutelles» – aucune Assemblée générale des Nations unies, depuis la décision de l’Espagne de se retirer des territoires du Sahara occidental, n’a considéré ces territoires sous une quelconque tutelle étatique qui soit.

Dans le souci d’activer le processus de décolonisation, l’Assemblée générale a adopté en 1960 une Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples colonisés -la guerre d’Algérie qui faisait rage alors et l’activité des politiques du FLN ailleurs ont pour ainsi dire influencé les divers points de vue concernant l’idéologie du colonialisme. Cette déclaration, donc, sur la décolonisation stipule que tous les peuples ont le droit à la libre détermination et proclame la nécessité de cesser au plus vite, inconditionnellement, le colonialisme.

Deux années plus tard -à l’indépendance officielle de l’Algérie- l’Assemblée générale des Nations unies a mis sur place un Comité spécial pour suivre l’application de la déclaration et formulé des recommandations relatives à son application. Des pays comme le Vietnam, l’Angola, le Mozambique, le Cap Vert, alors, ont depuis acquis leur indépendance après avoir lutté contre l’occupant, pour le premier cité d’une manière endurante et acharnée contre le France, ensuite contre les Etats-Unis. Mais entre-temps, en 1967, Israël, durant la guerre des Six jours, occupe le Golan, le Sinaï et la Palestine, dans les territoires de Ghaza, la Cisjordanie et Jérusalem-Est. Le Conseil de sécurité des Nations unies se réunit en urgence le 22 novembre 1967 et parvient, à la majorité absolue des quinze membres, à la Résolution 242, condamnant implicitement l’occupation des territoires et stipulant le retrait des troupes israéliennes. Mais elle y adjoint une littérature concernant un processus de paix régionale globale, qui ménage la susceptibilité des superpuissances, les USA partie prenante avec Israël et l’Urss, sympathisante avec les Arabes et le Palestiniens. Un processus de paix qui va durant longtemps, jusqu’à maintenant, noyer la véritable revendication palestinienne. Qui est le recouvrement souverain des territoires arrêtés selon les dispositions du plan de partage en 1947, consacré par la Résolution 181 de l’Assemblé générale de l’ONU. Mais Israël ne se réfère pas aux résolutions lorsqu’il manœuvre dans les territoires anciennement contrôlés par le Royaume-Uni et la France, récupérés à la chute définitive de l’empire ottoman, à travers les accords secrets de Sykes-Picot en pleine guerre mondiale, en 1916.

Ceuta et Melilla et le rêve de Bruxelles

Mais bref, sous la protection des Etats-Unis, Israël brave toutes les tentatives de règlements internationaux. Le gouvernement israélien décide, en 1980, d’élever Jérusalem -de l’ouest comme de l’est- en tant que capitale d’Israël, le monde entier est contre lui, y compris les USA, pour la première fois. Le Conseil de sécurité adopte le 20 juin 1980 la Résolution 476 demandant instamment à Israël, la puissance occupante, de se conformer à la présente résolution et d’interrompre les mesures affectant le caractère et le statut de la ville sainte de Jérusalem.

La subtilité est remarquée ici, dès lors que les Etats-Unis n’opposent pas de véto, qui ne dit pas que Jérusalem-Est appartient aux Palestiniens, une partie constituante de la Palestine, mais une ville sainte représentant les trois obédiences abrahamiques.

Les instances des Nations unies ne cessent de ressasser le discours de la décolonisation. Ses structures demeurent impuissantes pour y parvenir. L’Assemblée générale en 1990 a affirmé que les années 1990-2000 seraient la Décennie de l’élimination du colonialisme. Parce que l’empire soviétique s’est effiloché de lui-même, de même pour le regroupement de la Yougoslavie et la scission de la Tchécoslovaquie, où le redimensionnement des nouveaux Etats s’est produit sans intervention quelconque des Nations unies. D’une Assemblée générale à l’autre, jusqu’à celle de 2011, proclamant la troisième Décennie internationale de l’élimination du colonialisme, il ne ressort absolument rien de concret sur le terrain des revendications. Israël agit en toute liberté dans le fait accompli. Il fait ce qu’il veut dans les territoires soi-disant libérés de Ghaza – se permettant même d’y pratiquer le génocide après l’avoir asphyxier sous l’embargo. D’orchestrer la judaïcité dans les territoires qu’il contrôle, de façon à démontrer au monde, en toute impunité, sa ségrégation anti arabe et anti chrétienne aussi. Pendant que les Etats-Unis confortent autour d’eux le noyau des puissances mondiales contre la reconnaissance de l’Etat de la Palestine. Malgré tout, ça et là, des sursauts «héroïques», symboliques et isolés, qui regardent dans la réalité de la Palestine. La Suède a été l’exemple le plus magistral donné aux autres Etats-membres de l’ONU, les Etats économiquement puissants, capables d’agir sur le plan de la sanction commerciale.

Il reste le conflit du Sahara occidental. La dernière colonie d’Afrique, si l’on excepte celle de Ceuta et Melilla -puisque le royaume du Maroc lui-même ne semble pas en faire cas. Une colonisation que la totalité des Etats du continent condamne. Au point où le pays colonisateur veut intégrer l’Union européenne. Et rien ne dit -dans ce vaste processus mondial de l’abandon de l’Afrique, si ce n’est l’intérêt pour ses matières premières, aujourd’hui, risques de contamination obligent, même pas pour sa main-d’œuvre-, que Bruxelles n’intégrera pas Rabat en même temps qu’Ankara. Histoire de raconter que le Vieux continent n’est pas si vieux que certains le pensent. Comme les Etats-Unis et la Chine, par exemple. Tentant de consommer la planète par les deux bouts.

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