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Les Pays-Bas devraient-ils moins toucher aux droits de l’homme pour atteindre d’autres objectifs – tels que le gaz, la sécurité ou la réduction de l’immigration ? Récemment, un débat très médiatisé a eu lieu à ce sujet à la Chambre des représentants, au cours duquel le ministre Wopke Hoekstra a plaidé pour un “réalisme effectif”. Ruben Brekelmans (VVD) a demandé : “Sommes-nous prêts à nous salir les mains ?”.
La réponse à cette question réside dans l’offensive de charme des Pays-Bas à l’égard du Maroc. Avec Mark Rutte et les Quatre Amigos (Blok, Kaag, Knapen, Hoekstra). Pour comprendre l’ensemble de la saga, il faut remonter aux manifestations dans le Rif et au ministre Stef Blok qualifiant en 2018 les peines (jusqu’à 20 ans) de certains leaders de la contestation de “haut de gamme”. Cela a touché les longs orteils de Rabat. Aucun autre demandeur d’asile débouté n’a été repris.
Fin 2019, l’ambassadeur du Maroc ici présent a annulé un rendez-vous avec la secrétaire d’État Ankie Broekers Knol – un affront diplomatique. Broekers-Knol s’est plainte qu’elle “ne vient pas au Maroc” pour parler des demandeurs d’asile déboutés. L’opposition a vu un “gâchis”, le VVD a demandé des “contre-mesures”.
Le cabinet était proche du désespoir. Un premier ministre avec les mains dans les poches. Les diplomates ont failli ronger leurs cravates, c’était si grave. Il a été décidé de fuir devant. Les diplomates se sont mis au travail. Et voilà que le 8 juillet 2021, un “plan d’action” avec le Maroc a été signé.
Une percée, il s’est avéré par la suite. C’est là que l’histoire entre dans la Quatrième Dimension. Au Maroc, la presse et les autorités ont publié des parties du plan d’action, qui prévoit une coopération dans de nombreux domaines. Aux Pays-Bas, les militants des droits de l’homme comme Habib el Kaddouri ont réagi avec inquiétude : comment échanger des informations sur le financement des ONG, comment “rassembler” la communauté marocaine aux Pays-Bas ?
Sensible, chut, chut
Sinon, il est resté silencieux. Ce même 8 juillet, date à laquelle son haut fonctionnaire a signé le plan d’action lors d’une fête virtuelle avec Rabat, la ministre Sigrid Kaag (successeur de Blok), interrogée sur le Maroc par Kati Piri (PvdA), n’a rien dit à ce sujet à la Chambre. Kaag a annoncé “un processus de consultations politiques”. Elle y reviendra, en raison des “intérêts différents et du risque de conflit” dans une lettre. Sensible, hush hush.
Les procès de journalistes marocains, comme celui d’Omar Radi, accusé à tort d’être un espion des Pays-Bas ( !), “nous les suivons de près”, a déclaré M. Kaag. L’ambassade des Pays-Bas assiste également au procès. Seulement : ce n’était pas le cas, le ministère l’a reconnu par la suite. Pendant longtemps, les Pays-Bas ont manqué toutes les occasions d’envoyer un signal public indiquant que l’allégation était absurde. La pression exercée en coulisses est plus efficace, a-t-on dit. Peu de temps après avoir signé le plan d’action, Radi a été condamné.
La lettre promise par Kaag est arrivée cinq mois plus tard, le 14 décembre, signée par Ben Knapen. Le Maroc est désormais “un facteur stable dans la région” et un “partenaire essentiel et stratégique”. Le plan d’action a fait son apparition, avec la nouvelle que l’on allait travailler sur un traité d’extradition – une question sensible pour les Néerlandais du Maroc qui craignent le bras long de Rabat. Après que Knapen ait été remplacé par Hoekstra, les Pays-Bas ont également pris le parti de Rabat sur le Sahara occidental, un cas de néocolonialisme marocain. Tout est sorti du placard !
Plan d’action public
La semaine dernière, après d’interminables questions, pressions et pressions de la part de Piri, le plan d’action a été rendu public, 16 mois après sa signature. Chacun peut désormais lire les petits caractères concernant la non-ingérence dans les affaires intérieures de l’autre, la coopération en matière de migration, y compris la “réadmission”. Et encore une autre nouvelle : il y aura un centre culturel marocain à Amsterdam – apparemment une surprise pour le conseil municipal d’Amsterdam.
Tout cela, et peut-être plus encore, pour renvoyer des demandeurs d’asile déboutés ? Seulement une poignée jusqu’à présent, d’ailleurs. Piri n’est pas contre les accords de migration (comme avec la Turquie auparavant), mais pas en tant que compromis pour les droits de l’homme. Nous avons appris qu’il est difficile de conclure des accords avec des pays autocratiques, car ils ne les respectent jamais. Brekelmans se félicite de la direction prise et de la “priorité accordée à la sécurité et à la migration”.
Le Maroc joue bien ce dossier, dit el Kaddouri. Ça ressemble à du chantage politique. Reste à savoir s’il s’agit d’un “réalisme efficace” ou de la diplomatie du Père Noël (tout donner et ne rien recevoir en retour).
Si, après l’échec de toutes les autres approches, le cabinet a décidé d’une offensive de charme avec l’eau nécessaire avec le vin, pourquoi la rétention d’informations ? Nous n’avons pas à avoir honte ?
Volkskrant, 04/12/2022