Tags : Parlement Européen, Corruption, Qatargate, Moroccogate, Union Européenne,
( 2023/2571(RSP) )
Le Parlement européen ,
– vu sa résolution du 15 décembre 2022 sur les soupçons de corruption du Qatar et le besoin plus large de transparence et de responsabilité au sein des institutions européennes[1] , à sa délibération du 25 octobre 2016 sur la lutte contre la corruption et le suivi de la délibération CRIM[2] et à sa résolution du 19 janvier 2023 sur la situation des journalistes au Maroc, notamment le cas d’Omar Radi[3] ,
– vu l’ensemble de mesures proposées par le président du Parlement européen visant à renforcer l’intégrité, l’indépendance et la responsabilité présentées le 8 février 2023,
– vu sa résolution du 9 mars 2022 sur l’ingérence étrangère dans tous les processus démocratiques de l’Union européenne, y compris la désinformation[4] ,
– vu sa résolution du 16 septembre 2021 sur le renforcement de la transparence et de l’intégrité au sein des institutions de l’Union par la création d’un organe indépendant d’éthique de l’Union[5] ,
– vu le discours du président de la Commission sur l’état de l’Union pour 2022 du 14 septembre 2022 et le programme de travail de la Commission pour 2023,
– vu la convention de 1997 établie sur la base de l’article K.3, paragraphe 2, point c), du traité sur l’Union européenne pour la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes ou des fonctionnaires des États membres de l’Union européenne[6] ,
– vu le règlement n° 31 (CEE), 11 (CEEA) fixant le statut des fonctionnaires et le régime applicable aux autres agents de la Communauté économique européenne et de la Communauté européenne de l’énergie atomique[7] ,
– vu le registre de transparence de l’Union européenne,
– vu la convention des Nations unies contre la corruption de 2003, qui témoigne d’une reconnaissance quasi universelle de l’importance de la bonne gouvernance, de la responsabilité et de l’engagement politique,
– vu les conventions du Conseil de l’Europe sur la corruption,
– vu le traité sur l’Union européenne, et notamment son article 29,
– vu l’article 132, paragraphe 2, de son règlement intérieur,
A. considérant que, en réponse immédiate à l’enquête en cours menée par les autorités belges qui a mis au jour un stratagème extrêmement préoccupant de corruption, de blanchiment d’argent et de participation à une organisation criminelle impliquant l’enquête d’actuels et d’anciens députés au Parlement européen et de leur personnel, sur 15 décembre 2022 Le Parlement adopte à une large majorité sa résolution sur les soupçons de corruption du Qatar et le besoin plus large de transparence et de responsabilité au sein des institutions européennes; considérant que la résolution appelait à l’adoption d’un certain nombre de mesures urgentes pour renforcer l’intégrité, la transparence et la responsabilité des institutions de l’Union européenne;
B considérant que le 8 février 2023, le président du Parlement européen a présenté un ensemble de mesures proposées visant à renforcer l’intégrité, l’indépendance et la responsabilité; considérant que les mesures ont été adoptées par la conférence des présidents du Parlement lors d’une réunion à huis clos;
C considérant que les dernières révélations portent gravement atteinte à la perception publique de l’Union européenne en général et du Parlement en particulier et risquent d’alimenter davantage le scepticisme à l’égard des institutions et du projet européens, ainsi que le sentiment croissant de méfiance à l’égard des institutions démocratiques et des élus de l’Union; considérant que les récentes révélations érodent considérablement la crédibilité du Parlement lorsqu’il traite et dénonce la corruption dans d’autres institutions de l’Union, des États membres ou des pays tiers;
D. considérant que la corruption attaque le fondement même de nos institutions démocratiques en déformant les processus électoraux, en pervertissant l’État de droit, en sapant la crédibilité des mandats publics et en créant des structures et des processus uniquement destinés à solliciter des pots-de-vin;
E. considérant que ce scandale de corruption sans précédent doit être saisi comme une opportunité pour le Parlement de revoir radicalement ses méthodes de travail et son règlement intérieur afin de regagner la confiance du public, de montrer l’exemple aux autres institutions européennes et de fournir un modèle pour une institution responsable et éthique démocratie parlementaire;
1. souligne que la transparence et la responsabilité sont des outils essentiels pour prévenir la corruption et garantir la confiance dans les institutions publiques, et souligne l’urgente nécessité de veiller à ce que le Parlement se dote de mesures fortes pour lutter en faveur de la démocratie, de la transparence et de la responsabilité et contre la corruption;
2. souligne que les pots-de-vin et les formes pernicieuses de corruption politique ont un impact extrêmement destructeur sur tous les aspects de la société, contribuent à l’instabilité gouvernementale, érodent la confiance du public dans les institutions démocratiques et constituent, en fin de compte, une grande menace pour la démocratie et l’État de droit;
3. souligne que la prévention et la lutte contre la corruption sont une responsabilité essentielle des institutions démocratiques et que ce n’est que par la coopération et l’implication de tous les organes responsables, y compris la conférence des présidents, la conférence des présidents des commissions, le bureau, le comité consultatif et toutes les commissions compétentes au sein Le Parlement, la Commission, le Conseil et les autres institutions pouvons-nous surmonter l’impact public extrêmement négatif des révélations actuelles ;
4. note que les propositions initiales visant à renforcer l’intégrité, l’indépendance et la responsabilité présentées par le président du Parlement européen le 8 février 2023 constituent une première étape nécessaire pour répondre au besoin urgent pour l’institution de garantir la responsabilité, la transparence et l’intégrité de l’Union européenne établissements; souligne toutefois qu’il est essentiel que le Parlement maintienne un niveau d’ambition élevé et demande que des mesures supplémentaires et plus étendues soient ajoutées au plan d’action, notamment en matière de protection, de suivi, de signalement et de contrôle des lanceurs d’alerte;
5. déplore vivement que deux mois après son pire scandale de corruption, il n’y ait pas eu de processus ouvert et transparent, y compris avec la participation d’experts externes; vise à remédier publiquement aux lacunes de ses règles internes et de leur application afin de montrer de manière crédible au public un engagement fort à mener des réformes et à regagner la confiance que les citoyens devraient avoir dans la seule chambre directement élue de la démocratie européenne ; regrette profondément que même les changements les plus évidents et les plus consensuels n’aient pas été adoptés par la plénière du Parlement ou d’autres organes compétents, y compris les modifications des règles de transparence pour tous les députés sans exception, pour leur personnel et pour leurs réunions et les réunions de leur personnel avec des groupes d’intérêt et des tiers représentants;
6. rappelle que le contrôle public et le contrôle démocratique sont primordiaux dans une démocratie qui fonctionne; demande une clarté et une transparence accrues dans le processus de réforme en cours afin d’assurer un contrôle public du processus et de regagner la confiance des citoyens et de la société civile par une action crédible; demande que toutes les décisions soient adoptées et que les délibérations aient lieu lors de réunions publiques, garantissant ainsi la responsabilité et le contrôle; déplore que le Parlement ait développé une pratique consistant à prendre des décisions, y compris celles relatives à la nomination des fonctionnaires de l’administration, sur la base de considérations politiques, plutôt que sur des critères objectifs tels que les qualifications;
7. souligne la nécessité d’accélérer de toute urgence le processus d’adoption et de mise en œuvre des réformes nécessaires pour regagner la confiance et assurer la prévention et la préparation afin de renforcer la transparence et la responsabilité du Parlement et de toutes les institutions de l’Union et de lutter contre la corruption; insiste pour que les réformes soient votées en plénière dès que possible, en tout cas au plus tard en juin 2023, et que des mesures plus ambitieuses soient ouvertement discutées et adoptées dès que possible;
8. regrette que les mesures adoptées ne contiennent pas de propositions pour une réforme crédible du comité consultatif sur la conduite des députés; s’engage à réformer ce comité consultatif conformément à sa proposition d’un organe d’éthique indépendant et estime que ce comité consultatif réformé devrait fonctionner jusqu’à ce que le nouvel organe d’éthique indépendant de l’UE puisse reprendre son rôle; souligne que cela doit impliquer l’adoption d’une définition claire et complète du conflit d’intérêts à la lumière des récentes révélations, l’introduction d’un contrôle par des experts externes, la possibilité pour le comité consultatif de contrôler les députés de sa propre initiative, la possibilité pour quiconque de formuler des plaintes fondées, l’introduction la publication obligatoire par le Président des sanctions adoptées et des situations où les sanctions ne sont pas appliquées,
9. se félicite du fait que les mesures adoptées prévoient des sanctions exécutoires et dissuasives, mais considère qu’il est absolument nécessaire de préciser ce que sont ces sanctions et comment elles doivent être décidées, mises en œuvre et appliquées de manière transparente; déplore qu’aucune sanction pécuniaire n’ait jamais été infligée pour une infraction au code de conduite des députés malgré au moins 26 infractions documentées dans les rapports annuels du comité consultatif sur la conduite des députés; estime que toute violation du code de conduite doit être sanctionnée financièrement et que ces sanctions doivent être dissuasives ; propose l’obligation pour le président d’expliquer les cas où des sanctions ne sont pas automatiquement imposées; est d’avis qu’en plus des sanctions financières, d’autres sanctions devraient également être envisagées en fonction de la gravité de l’infraction; note que le règlement prévoit que, pour certaines infractions, les députés ne peuvent être élus titulaires de mandats du Parlement ou de l’un de ses organes, être nommés rapporteurs ou participer à une délégation officielle ou à des négociations interinstitutionnelles; propose l’imposition de cette sanction pour les manquements graves au code de conduite;
dix. déplore que la protection des lanceurs d’alerte, en particulier au Parlement, mais aussi dans d’autres institutions de l’Union, soit plus faible que dans la directive pertinente; se félicite que les mesures adoptées s’engagent à améliorer la protection des lanceurs d’alerte et appelle à de nouveaux progrès dans ce domaine tout en appelant également la Commission et le Conseil à coopérer avec le Parlement sur la mise à jour et le renforcement des règles relatives à la protection des lanceurs d’alerte dans les institutions et organes de l’UE et agences ;
11. se félicite des mesures adoptées concernant l’introduction d’une période de réflexion avant que les anciens députés ne puissent travailler pour des représentants d’intérêts, des cabinets de conseil en affaires publiques, des cabinets de conseil, des cabinets d’avocats ou d’autres institutions cherchant à influencer l’élaboration des politiques européennes ou nationales; estime que cette période de réflexion devrait durer au moins six mois, mais que pendant cette période, un ancien député devrait pouvoir bénéficier de l’indemnité transitoire; demande la mise en place d’un système permettant un examen externe de chaque cas;
12. demande à nouveau aux institutions de l’UE de réformer le registre de transparence, notamment en introduisant des règles de transparence plus strictes, en cartographiant les financements étrangers pour le lobbying lié à l’UE et en garantissant des entrées permettant d’identifier les financements provenant de gouvernements étrangers et d’entités agissant en leur nom; se félicite des mesures adoptées sur l’obligation pour tous les députés, quel que soit leur rôle, les assistants parlementaires accrédités et le personnel de déclarer les réunions programmées avec des représentants diplomatiques de pays tiers et des tiers couverts par le champ d’application du registre de transparence; souligne que ces déclarations de réunions doivent être aussi claires et accessibles au public que possible et que des sanctions en cas de non-déclaration de réunions doivent être appliquées;
13. rappelle que toutes les organisations relevant du champ d’application du registre de transparence doivent suivre les règles relatives aux déclarations financières et que ces informations doivent être facilement accessibles; estime que le registre devrait avoir les moyens d’examiner ces déclarations; regrette que certaines déclarations ne précisent pas les montants exacts qui sont dépensés pour la représentation d’intérêts au sein des institutions européennes; rappelle l’importance d’une consultation transparente et équilibrée des parties prenantes dans le cadre de l’élaboration des politiques;
14. se félicite des mesures adoptées à l’égard des représentants du Qatar à la suite des révélations; réitère toutefois sa profonde préoccupation face aux allégations de corruption par les autorités marocaines et demande la mise en œuvre des mêmes mesures pour les représentants du Maroc; réitère son engagement à mener des enquêtes approfondies et à traiter les cas de corruption impliquant des pays cherchant à acheter de l’influence au Parlement;
15. se félicite des mesures adoptées pour introduire une déclaration obligatoire de conflit d’intérêts pour les rapporteurs et les rapporteurs fictifs; souligne l’importance d’appliquer véritablement les règles en matière de conflits d’intérêts par le biais de sanctions, le cas échéant;
16. se félicite des mesures adoptées pour accroître la transparence des déclarations financières des députés en exigeant davantage d’informations sur les emplois parallèles et les activités extérieures des députés; estime que le Parlement doit être plus strict et plus transparent en publiant le montant exact des revenus annexes perçus et les clients pour le compte desquels les députés travaillent contre rémunération; note que l’application de ces règles par le biais de sanctions, le cas échéant, est essentielle à leur pleine mise en œuvre; s’engage à interdire tout travail rémunéré des députés pour des organisations ou des individus relevant du champ d’application du registre de transparence de l’UE ; s’engage à n’autoriser les députés, les assistants des députés et le personnel à occuper des postes au sein d’organisations relevant du champ d’application du registre de transparence que si ces organisations y sont inscrites;
17. regrette que les mesures adoptées, bien qu’inclues dans sa résolution de décembre, ne prévoient pas explicitement l’instauration d’une déclaration de patrimoine par les députés en début et en fin de mandat, ce qui offrirait des garanties supplémentaires contre la corruption, à l’instar de nombreux États membres; estime que la déclaration de patrimoine ne devrait être accessible qu’aux autorités compétentes pour leur permettre de vérifier si les actifs déclarés correspondent aux revenus déclarés lorsqu’ils sont confrontés à des cas d’allégations étayées, ce qui rendrait sensiblement plus difficile la dépense des produits illégaux;
18. S’engage à mieux clarifier sa politique sur les remboursements de frais de voyage et les cadeaux reçus par les députés, ainsi qu’à mieux communiquer les règles sur les cadeaux et les voyages pour les députés et à renforcer leur application par des sanctions le cas échéant ; demande que des mesures adéquates garantissent que les frais de déplacement légitime vers des pays tiers liés au mandat puissent être couverts par l’institution;
19. s’engage à renforcer l’interdiction des activités parallèles de lobbying pour les députés et à la rendre pleinement effective, et à introduire une interdiction des discours, événements, articles et apparitions sponsorisés ;
20. se félicite des mesures adoptées pour faire respecter l’interdiction des activités des groupes d’amitié avec des pays tiers pour lesquels il existe déjà des délégations officielles du Parlement et qui pourraient entraîner une confusion avec les activités officielles du Parlement; souligne l’importance d’une transparence totale sur les activités des groupes d’amitié et d’une application accrue de leurs règles de transparence par des sanctions appropriées, y compris la dissolution de ces groupes non officiels si nécessaire;
21. déplore que le Bureau n’ait pas pleinement mis en œuvre la volonté de la plénière exprimée à plusieurs reprises de réformer l’indemnité de dépenses générales, empêchant ainsi la transparence et la responsabilité des dépenses de l’Union et favorisant une culture d’impunité;
22. est gravement préoccupé par les points du plan initial du président qui restreignent les résolutions sur les droits de l’homme déposées en tant que questions urgentes; est soulagé que ces points aient été retirés; souligne l’importance pour notre institution de continuer à agir en faveur de la société civile, des journalistes, des universitaires et des défenseurs des droits de l’homme et de l’environnement, qui risquent leur vie dans le monde entier pour défendre la démocratie, l’État de droit et les droits de l’homme; souligne à cet égard que les résolutions d’urgence sont un précieux, sinon le principal outil des droits de l’homme dont dispose le Parlement, un outil qui doit être préservé et même renforcé, et non sapé;
23. invite les États membres et toutes les institutions de l’Union, en particulier le Parlement, à renforcer leur coopération avec l’Office européen de lutte antifraude (OLAF), l’Agence de l’Union européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust) et le Parquet européen afin de assurer une enquête appropriée et efficace sur tous les cas présumés de corruption dans les institutions, organes et agences de l’UE ; demande que les capacités et la coopération entre l’OLAF et le Parquet européen soient encore renforcées, en tant qu’organes clés de l’UE en matière de lutte contre la corruption; souligne la nécessité d’une législation européenne unique directement applicable qui réglemente la corruption des fonctionnaires de l’UE;
24. demande à la Commission et au Conseil de coopérer avec le Parlement pour œuvrer à la réalisation des réformes nécessaires pour assurer la prévention et la préparation afin de renforcer la transparence et la responsabilité des institutions de l’Union et de lutter contre la corruption; souligne que le prochain paquet “Défense de la démocratie”, et en particulier les mesures visant à actualiser le cadre législatif de la lutte contre la corruption, offre une occasion opportune d’agir pour mettre en lumière l’influence étrangère et le financement clandestins et pour relever les normes relatives à des infractions telles que l’enrichissement illicite, le trafic dans l’influence et l’abus de pouvoir, au-delà de la corruption ;
25. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et aux gouvernements des États membres.
- [1] Textes adoptés, P9_TA(2022)0448 .
- [2] JO C 215 du 19.6.2018, p. 96.
- [3] P9_TA(2023)0014 .
- [4] JO C 347 du 9.9.2022, p. 61.
- [5] JO C 117 du 11.3.2022, p. 159.
- [6] JO C 195 du 25.6.1997, p. 2.
- [7] JO 45 du 14.6.1962, p. 1385.
Source: Parlement européen, 14/02/2023
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