Une partie de la classe politique marocaine est convaincue que d’autres pays suivront Israël en reconnaissant la revendication de Rabat sur le Sahara occidental.
Selon Middle East Eye, dans les couloirs du pouvoir au Maroc, les responsables ne cachent pas leur enthousiasme suite à la reconnaissance par Israël de la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental. En fait, certains attendent cette nouvelle depuis décembre 2020, lorsque le Maroc et Israël ont normalisé leurs relations.
“Nous attendions cette reconnaissance… et certains commençaient à douter de la volonté d’Israël de nous soutenir sur la question du Sahara”, a déclaré un membre du Parti Authenticité et Modernité (PAM), qui a souhaité rester anonyme.
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“Je pense que beaucoup de choses vont changer avec cette décision, car d’autres puissances voudront maintenant suivre les traces des États-Unis, de l’Espagne et d’Israël.”
Les États-Unis ont accepté de reconnaître la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental en échange de la normalisation des liens avec Israël par Rabat. L’Espagne a suivi en mars 2022, en échange notamment d’un meilleur contrôle de l’immigration en provenance du Maroc.
Parmi les trois partis qui forment la majorité au Parlement marocain – les libéraux du PAM et du Rassemblement National des Indépendants (RNI), ainsi que les conservateurs de l’Istiqlal – nombreux sont ceux qui ont vivement salué la décision d’Israël, communiquée dans une lettre du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu au roi Mohammed VI lundi dernier.
Sous la direction du Premier ministre Aziz Akhannouch, le RNI a salué “la sagesse” du roi dans la gestion de la question du Sahara occidental, ce qui a entraîné “un groupe de pays soutenant explicitement la légitimité et la crédibilité de la proposition marocaine, dont la dernière est la position israélienne”.
Le parti de l’Istiqlal a également exprimé “sa grande satisfaction de cette décision importante” et a salué la volonté d’Israël d’envisager l’ouverture d’un consulat à Dakhla, une ville située au Sahara occidental.
Selon l’agence de presse espagnole EFE, le Maroc prévoit d’élever le Bureau de liaison israélien à Rabat au rang d’ambassade.
Dans la même déclaration, l’Istiqlal a réaffirmé son soutien aux Palestiniens dans leur “lutte pour réaliser leurs demandes justes et légitimes et établir leur État palestinien indépendant, pleinement souverain et viable, avec Jérusalem-Est comme capitale”.
La position officielle du Maroc soutient une solution à deux États pour le conflit israélo-palestinien et l’établissement d’un État palestinien sur les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale.
Silence du Parti de la Justice et du Développement (PJD)
Les seuls acteurs politiques à ne pas partager l’allégresse sur la scène politique marocaine sont les islamistes du Parti de la Justice et du Développement (PJD), dont le dirigeant, Abdelilah Benkirane, est habituellement très actif sur les réseaux sociaux.
Le silence et le malaise règnent au sein du parti depuis lundi. Aucun communiqué de presse n’a été publié par le parti ni d’articles sur le sujet sur son site médiatique, même si l’information a été relayée par la presse locale et internationale.
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“Le sujet est sensible. Je pense que tout le monde attend une réaction de Benkirane. C’est d’autant plus embarrassant puisque c’est notre parti qui a signé l’accord tripartite [entre le Maroc, les États-Unis et Israël]”, a déclaré un responsable du parti à Middle East Eye, sous couvert d’anonymat.
À l’époque, l’ancien Premier ministre Saad-Eddine El Othmani, membre du PJD, avait été sous pression pour signer l’accord de normalisation, ce qui lui avait valu de vives critiques de la part des islamistes arabes, ainsi que des accusations d’avoir abandonné la cause palestinienne pour des fins politiques.
“Pour moi, c’est une continuation logique de la normalisation avec Israël, avec qui l’accord a conduit à la reconnaissance de la marocanité du Sahara. La question est : comment ce soutien va-t-il se concrétiser au niveau international ?” a déclaré le responsable.
Un ancien responsable du PJD a déclaré à MEE que le parti avait signé la normalisation dans l’intérêt du Maroc avant tout.
“La décision, qui est le fruit de cet accord, est donc naturelle. Et la position du Maroc sur la question palestinienne n’a pas changé, mais le sujet est embarrassant pour Benkirane”, a déclaré l’ancien responsable. Benkirane a critiqué à plusieurs reprises la normalisation avec Israël.
En mars, le PJD a “regretté” les positions récentes du ministre marocain des Affaires étrangères, Nasser Bourita, dans lesquelles il “semble défendre l’entité sioniste lors de certaines réunions africaines et européennes, alors que l’occupation continue son agression criminelle contre nos frères palestiniens”, a déclaré le parti en faisant référence aux raids militaires et aux colonies dans la Cisjordanie occupée.
Le cabinet royal a dénoncé la déclaration du PJD, la qualifiant de “dépassement irresponsable”.
“Expropriation des terres tribales”
Le retard dans la reconnaissance officielle par Israël du Sahara occidental comme marocain était particulièrement lent – deux ans après l’accord de normalisation – et avait commencé à agacer certaines personnalités politiques, telles que Bilal Talidi, membre du PJD et ancien chroniqueur d’Attajdid.
Dans un article publié en juillet, Talidi a reproché à Israël d’avoir manqué à ses engagements envers le royaume.
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Pendant ce temps, le politologue Aziz Chahir estime que “le retard planifié dans la décision d’Israël serait révélateur de la pression exercée par Israël sur le Maroc afin d’obtenir une ‘normalisation complète’ à long terme.
“Le gouvernement de Mohammed VI a cédé à la détermination d’Israël d’avoir une position militaire stratégique au Sahara occidental et en Afrique du Nord.”
Chahir a souligné qu’en 2022, dans les régions de Guelmim, Oued Noun et Sakia El Hamra, dont certaines parties se trouvent au Sahara occidental, des personnes ont manifesté contre “l’expropriation des terres tribales pour lancer des projets d’énergie renouvelable” dirigés par Israël et les Émirats arabes unis.
Chahir estime que le moment choisi reflète “le désir américain de contrecarrer les manœuvres de l’Algérie visant à renforcer son alliance avec la Chine et la Russie”, faisant référence aux récentes visites du président algérien Abdelmadjid Tebboune à Beijing et à Moscou.
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