Algérie : Un ton et des pratiques contre-productifs

par Kharroubi Habib

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Le haut commandement de l’ANP et son homme fort le général Ahmed Gaïd Salah, vice-ministre de la Défense nationale et chef d’état-major, sont déterminés à garder le cap sur l’organisation dans les plus brefs délais de l’élection présidentielle afin que le sommet de l’Etat renoue avec la légitimité constitutionnelle irrécusable dont il n’est plus investi aux yeux de la majorité des Algériens depuis le 9 juillet qui a marqué la forclusion de l’intérim dévolu en sa qualité de président du Sénat à Abdelkader Bensalah suite à l’activation de l’article 102 à l’encontre de l’ex-chef de l’Etat Abdelaziz Bouteflika.

Mais s’ils ont obtenu le ralliement à leur agenda d’une frange non négligeable de l’opposition ainsi que de personnalités politiques et d’organisations et associations de la société, ils sont loin d’avoir réuni les conditions de l’ouverture du dialogue national sur les modalités et mécanismes à mettre en place pour le scrutin auquel Bensalah en accord avec eux a convié l’ensemble des acteurs politiques et sociétaux. L’agenda auquel tiennent le haut commandement de l’armée et son chef le général Gaïd Salah est en effet rejeté par d’autres acteurs politiques et sociétaux dont l’absence au dialogue proposé par Bensalah rend impossible de considérer l’accord qui en découlerait comme le produit d’un consensus vraiment national. Cela d’autant que ces parties disposent visiblement d’une influence qui fait défaut à celles qui ont fait preuve de réceptivité à l’égard de la démarche politique prônée par le haut commandement de l’armée pour la sortie de crise.

C’est à cet ancrage populaire des opposants à sa démarche que le chef d’état-major de l’ANP s’est décidé de s’attaquer en musclant son discours contre ces opposants qu’il a fini par traiter de « traîtres » travaillant contre les intérêts de la nation et obéissants à des cercles étrangers dont les desseins sont de plonger l’Algérie dans le chaos menant à la destruction en tant qu’Etat. Gaïd Salah n’a pas fait que jeter l’opprobre sur cette grange de l’opposition, il a formulé des directives aux forces de l’ordre dont l’application se traduit par la chasse aux militants et activistes qui relaient ses slogans et mots d’ordre au sein du mouvement populaire. Ce qui ne dispose pas pour autant ce dernier à se démarquer de cette frange de l’opposition au principe qu’il milite pour la liberté d’expression et d’opinion.

La tentation au recours à la répression dont est indicatrice l’attitude du vice-ministre de la Défense nationale est de même désapprouvée par ceux qui ne sont pas fermés à l’option de l’élection présidentielle en tant qu’opération première à la réinstauration de la légitimité constitutionnelle. Ils ont en effet conscience qu’abonder dans le sens d’un pouvoir qui use de l’argument de la répression contre ses adversaires leur vaudra un irréparable discrédit dans l’opinion publique dont ils ne pourront se prémunir qu’en se montrant à l’égard de ce pouvoir intransigeants sur la défense des libertés d’expression et d’opinion.

Le Quotidien d’Oran, 13 jui 2019

Tags : Algérie, ANP, armée, Gaïd Salah, dialogue, constitution,

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