Conférence de Berlin, une paix à inventer

L’Allemagne, le pays organisateur, et l’ONU, son initiatrice, auront pris tout leur temps pour que la conférence de Berlin sur la Libye, qui s’ouvre demain, à défaut d’être un complet succès, du moins ne soit pas un retentissant échec, comme l’a été pour l’essentiel celle de Palerme, en novembre 2018, à quoi par ailleurs elle ressemble par bien des aspects. Il n’en reste pas moins qu’il a fallu attendre la dernière ligne droite pour que l’on ait une idée plus précise des participants.

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L’Algérie et la Tunisie n’y auraient probablement pas été invitées si la conférence s’était tenue en octobre dernier, comme prévu initialement. Non plus d’ailleurs Fayaz el-Serraj et Khalifa Hafter qui ne l’ont été qu’à la veille de sa tenue.

A la différence de la conférence de Palerme, qui avait rassemblé tous les pays ayant voix au chapitre dans le conflit libyen, qu’ils soient ou non militairement impliqués, mais également les deux camps libyens, celle de Berlin avait été conçue à l’origine pour réunir les grands pays d’une part, et de l’autre, les parties prenantes étrangères au conflit.

A Palerme il s’était agi pour les participants de faire pression sur les factions libyennes pour les amener à s’engager dans un processus de paix sous l’égide de l’ONU. A Berlin, la pression ne devait s’exercer que sur les pays alliés extérieurs des deux camps libyens. C’était eux que l’émissaire onusien voulait prioritairement convaincre d’arrêter d’entretenir la crise libyenne.

Dans cet esprit, il estimait n’avoir besoin de la présence ni des pays comme l’Algérie et la Tunisie, qui en effet ne s’étaient alignées sur aucun camp libyen, ni même de celle des Libyens, en raison de leur trop grande dépendance vis-à-vis de leurs soutiens extérieurs. Pourquoi associer à la recherche de la paix des pays qui après tout ne sont pas en guerre en Libye, ou des parties libyennes qui elles ne peuvent rien décider par elles-mêmes?

S’il y a une paix à forger dans ces conditions, ce serait exclusivement entre leurs alliés extérieurs les plus engagés à leurs côtés. Celle qui concernerait directement les Libyens viendrait par surcroît. Si Turcs et Qataris d’un côté, Egyptiens et Emiratis de l’autre, pour ne prendre qu’eux, cessaient de s’affronter par Libyens interposés, le retour de la paix entre ces derniers serait facile, s’était dit, avec beaucoup de bon sens, Ghassan Salamé.

Sans l’intervention de l’Allemagne, le pays organisateur, la conférence de Berlin était donc partie pour différer notablement, à la fois par son objectif et par le nombre réduit de ses participants, de celle de Palerme. Ce sont les Allemands qui ont invité les parties dont Ghassan Salamé avaient pensé qu’elles ne seraient d’aucune utilité, les unes parce que justement elles n’étaient pas en guerre, et les autres parce qu’au contraire elles ne faisaient que ça, à la fois pour elles-mêmes et pour le compte d’autrui.

Un autre aspect mérite d’être relevé qui ne risquait pas de faire son apparition la veille de la conférence de Palerme. La Turquie a attendu la veille de la conférence de Berlin pour annoncer l’envoi de soldats en Libye.

Une conférence internationale s’apprête à s’ouvrir, et le président turc, qui probablement y sera présent en personne, ne trouve rien de mieux à faire que de parler de dépêcher son armée, dans ce pays même qu’il s’agit de tirer des griffes de la guerre ! Or Recep Tayyip Erdogan ne s’est pas contenté de faire cette annonce, mais a promis par la même occasion de donner une leçon mémorable au général Haftar, dans le cas où celui-ci continuerait de menacer le gouvernement de Tripoli. On se croirait revenu au 16e siècle, au temps de la conquête ottomane de Tripoli.

Le Jour d’Algérie, 18 jan 202

Tags : Algérie, Libye, Tunisie, Haftar, Turquie, Russie, Allemagne,

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