L’Algérie, une menace stratégique pour le rêve d’expansion impériale du Makhzen

Par Noureddine Khelassi*

«Les relations avec le Maroc sont anormales (…), même si les relations entre les deux peuples sont exemplaires.» On doit cette définition en forme d’aphorisme à M. Ramtane Lamamra, alors ministre des Affaires étrangères de l’Algérie du 4e mandat de l’ancien président de la République Abdelaziz Bouteflika. Trois épisodes récents, côté marocain, sont venus donner un peu plus de relief à cet axiome. D’abord un dérapage contrôlé du consul du Maroc à Oran qui a déclaré à des sujets de Sa Majesté chérifienne que l’Algérie indépendante est un «pays ennemi».

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Ensuite, une étude intitulée «Pour une nouvelle stratégie de défense intégrée du Maroc», œuvre d’un think tank marocain qui considère notre pays comme une menace permanente.

Cette boîte à idées, caisse de résonance des Forces armées royales (FAR), voit elle aussi en l’Algérie un rival historique et un ennemi permanent. Et, en troisième lieu, la construction en cours d’une base militaire d’écoute juste à la frontière avec l’Algérie.

Le think tank en question, un forum d’études considéré comme une référence établie en matière de questions militaires marocaines, préconise en effet «une nouvelle stratégie de défense intégrée» contre les menaces militaires, jugées réelles, que représentent pour le royaume alaouite l’Espagne au Nord et l’Algérie à l’Est.

Une préconisation en forme d’aveu d’existence d’une paranoïa aiguë qui fait penser aux auteurs de l’étude que le Maroc est pris en tenailles entre deux menaces militaires puissantes et durables. Une recommandation, dont la sémantique guerrière trahit la démesure d’ambitions impériales, voire impérialistes. Qu’on en juge notamment à travers ce petit inventaire de formules éloquentes : «stratégie d’expansion des empires marocains», «prise de contrôle et d’influence dans la zone s’étendant jusqu’à la Guinée au Sud, et en se limitant au Mali à l’Est», soit une aire géographique s’étendant bien au-delà de l’ancienne Afrique soudanaise d’avant et du temps des colonisations. Ou encore le vocable «leadership» (politique, économique et militaire) utilisé trois fois dans une même page et une fois dans la courte conclusion de l’étude.

De même que le mot «puissance», deux fois usité en introduction et en conclusion. Le terme «empire», une seule fois mais au pluriel, et, dans la même logique d’appétit stratégique, les termes «influence», «contrôle», «expansion» et «profondeur stratégique» appuient en un seul usage la démonstration de l’ambition historique, mais toujours actuelle, de l’hégémonisme de la monarchie alaouite. L’obsession durable «d’identifier ses ennemis et rivaux historiques» est donc bien appuyée dans cette étude adossée à l’examen de la balance militaire et, en filigrane, le souci d’atteindre au moins la parité stratégique avec l’Algérie. Elle est fondée également sur la notion même de dissuasion. Ses auteurs ne manquent donc pas de suggérer que les FAR doivent au moins mettre à jour leur outil de défense pour rattraper les retards technologiques et être en mesure de répondre le cas échéant aux manifestations de la supposée menace stratégique venue de l’Est. On sait que la dissuasion consiste à prévenir un acte éventuel en persuadant celui qui l’envisagerait que les coûts consécutifs en excéderaient les bénéfices escomptés.

Il est vrai que l’adoption par le Makhzen de la théorie de la dissuasion stratégique est dans l’ordre logique des choses, l’idée que la possession de moyens militaires appropriés est de nature à dissuader un «pays ennemi» d’attaquer remontant à l’Antiquité. Mais le Maroc, qui est par essence géographique un pays essentiellement maritime — deux mers dessinent ses contours physiques et décident de son approche de la menace stratégique au Nord — et ne possède de frontières terrestres qu’avec l’Algérie voisine et, par le fait accompli de l’annexion coloniale du Sahara occidental, avec la Mauritanie, veut par conséquent renouveler la place de la dissuasion dans sa stratégie défensive-offensive.

Les crânes d’œufs qui ont proposé dernièrement «une nouvelle stratégie de défense intégrée du Maroc» basée sur un «nouveau dispositif militaire dissuasif» remplacent l’idée de «comment éviter la guerre ?» par «comment gagner la guerre ? A l’instar de la dissuasion nucléaire qui repose sur la peur du recours par l’autre à l’arme atomique, le souci de ces stratèges est de conserver des moyens suffisants de frappe contre l’agresseur présumé après avoir subi une première attaque : c’est la fameuse «capacité de seconde frappe», élément moteur de la course aux armements à laquelle se livre éperdument un Maroc qui n’a pourtant pas les moyens financiers de ses grandes ambitions qui dépassent en fait le cercle de l’équilibre de la menace.

Pour que cette nouvelle stratégie militaire offensive puisse avoir du sens, il faudrait que l’état-major des FAR et le cabinet du palais royal soient en mesure d’évaluer avec précision les coûts, les gains et les pertes de leurs actions. Car les décisions irrationnelles du Makhzen pourraient conduire à des décisions rationnelles de l’autre côté de la frontière Est, et donc surprendre le Maroc et déclencher un engrenage des plus dangereux. Dans un contexte de crise endémique caractérisant les relations bilatérales, le discours de ce think tank, aux accents martiaux, est de nature à altérer le jugement de ceux auxquels il est destiné en premier ressort. La possibilité d’une mauvaise interprétation des intentions de l’autre peut conduire notre voisin de l’Ouest à des décisions irrationnelles au regard du principe même sur lequel repose la dissuasion, à savoir la neutralisation réciproque. Dans l’histoire de la guerre froide, la crise de Cuba a pourtant force de bon exemple. Elle a amené à prendre des mesures autres que militaires visant à diminuer les risques propres à la dissuasion nucléaire grâce à des moyens de communiquer en temps de crise entre les deux camps ; grâce aussi à la possibilité de toujours mieux connaître les intentions réelles de l’adversaire par des moyens précis d’observation et d’espionnage.

Enfin, grâce surtout à la maîtrise des décisions d’emploi et de préparation des armes par la centralisation et le renforcement de la sécurité de la chaîne de commandement qui est en Algérie une préoccupation permanente de l’état-major de l’ANP et de ses outils de veille et de vigilance.
À cette époque trouble des blocs Est-Ouest, Américains et Soviétiques œuvraient en permanence à évaluer l’aspect essentiellement défensif ou agressif de la politique militaire de l’autre camp par rapport à leurs intérêts vitaux respectifs, les Américains ayant plutôt tendance à prêter à l’autre des intentions plus agressives que la réalité telle qu’elle a pu être connue plus tard grâce aux archives disponibles.

Ce parallèle avec l’ex-Union soviétique et l’Amérique impérialiste suggère que le Maroc est dans une posture paranoïaque permanente. Délires découlant probablement du rêve grandiose du «Grand Maroc» et des «stratégies d’expansion des empires marocains», avec leurs corollaires la «puissance», le «leadership», le «contrôle», «l’influence» et la «puissance», mots-clés de la terminologie belliqueuse de l’étude objet de notre intérêt. En termes de doctrine et de moyens, le leadership de la «puissance régionale» au service d’une ambition géostratégique repose sur les outils traditionnels de la diplomatie, de l’influence économique, du lobbying, du rayonnement culturel, de la compénétration religieuse par l’emprise de l’islam maraboutique, du savoir-faire et du faire-savoir touristique.

En d’autres mots, de l’exercice du soft-power, domaine où, il faut le reconnaître, le Makhzen a acquis une certaine maîtrise. Aux gains cumulés de la capacité d’influence et de persuasion, de l’image de marque, de l’attractivité, du lobbying et de la performance du commerce extérieur, entre autres paramètres du renforcement du positionnement sur le théâtre régional et la scène internationale, s’ajoute, bien sûr, le facteur déterminant de la force militaire en perpétuel consolidation.

Sur ce plan, l’étude du think tank Forum FAR Maroc, qui a fait sienne la devise latine «si vis pacem para bellum» (pour avoir la paix il faut préparer la guerre), reconnaît de prime abord que la naissance de l’Algérie indépendante a constitué «la menace majeure sur l’existence du Maroc actuel».

Elle admet ensuite que la doctrine et l’outil de guerre des FAR ont été déterminés par cette «menace majeure» présumée. Les auteurs de l’étude le reconnaissent d’ailleurs sans ambages en soulignant que «l’équipement, la formation et la disposition des unités des Forces armées royales (FAR) ont, depuis ce jour (la fin de la colonisation de l’Algérie, ndlr), été orientés dans cette perspective d’une confrontation éventuelle avec l’Algérie».

Deux faits de guerre marquants, l’agression contre l’Algérie en 1963 et le conflit militaire au Sahara occidental annexé en 1975 sont considérés donc comme un déclic et un «tournant décisif dans la construction de la doctrine des FAR». Laquelle est notamment fondée sur «le souci de stopper l’assaut d’un ennemi en supériorité numérique et d’arrêt de colonnes blindées venant de l’Est».

Cette doctrine, structurée par la croyance permanente en une menace stratégique émanant d’un voisin foncièrement agressif et par définition offensif et expansif, est cependant spécieuse. Fallacieuse, oui, elle l’est assurément car elle suppose, comme le prétend l’étude du think tank, que les FAR ne s’équipent qu’en «réponse aux acquisitions récentes de l’ANP algérienne» et, de ce fait, «entreprennent un programme ambitieux de modernisation des dotations toutes armes confondues».

Et si l’Espagne et surtout l’Algérie n’existaient pas, le Maroc se serait-il abstenu de bâtir ses FAR pour être finalement le Costa-Rica du Maghreb et de l’Afrique ? On ne peut pas suggérer l’existence d’une doctrine militaire purement défensive et déterminée par l’existence supposée d’une menace offensive permanente et évoquer en même temps, comme le fait clairement ce Forum des FAR, une «stratégie d’expansion des empires marocains», et une «prise de contrôle et d’influence dans la zone s’étendant jusqu’à la Guinée au Sud, et en se limitant au Mali à l’Est».

Ou encore parler de «leadership», de «puissance» d’«influence», de «contrôle», d’«expansion» et de «profondeur stratégique». Il y a là une contradiction et une absurdité flagrantes ! Un paradoxe et une aberration d’autant plus grands que l’Algérie, désignée comme ennemi stratégique et héréditaire, est ciblée en profondeur, à 200 km d’Alger, à travers une liste d’objectifs stratégiques devant être l’objet de frappes en profondeur, telle la base aérienne de Chlef, les installations militaires de Sidi Bel- Abbès et les installations gazières et pétrolières d’Arzew !

Toutefois, face à l’Algérie, reconnue par le think tank comme la première force sous-marine dans le monde arabe, et à défaut de gaps technologiques à réaliser, le Maroc a d’incontestables retards à rattraper notamment dans les domaines aérien (chasseurs et bombardiers de 4e génération, hélicoptères de combat), naval (frégates évoluées, BPC, bâtiments de soutien et d’assistance), sous-marinier (sous-marins classe Kilo) et dans celui de la défense aérienne, talon d’Achille des FAR (sites stratégiques à découvert, pas d’équivalent des systèmes S300 ou même de S400 (?). Sans compter, en termes de menace aéroterrestre, l’absence reconnue de système moderne de communication sécurisée relatif au commandement et à l’échange de données entre les unités opérationnelles. Sur la balance stratégique, cette liste de handicaps militaires marocains n’est pas exhaustive.

Le sujet n’est donc pas l’examen détaillé et expert des avantages et des désavantages, mais l’idée même que malgré les retards technologiques, quantitatifs et qualitatifs des FAR par rapport à l’évolution de l’outil de défense algérien, le système de guerre marocain est à la fois défensif et offensif. Sachant qu’il s’inscrit dans la double logique du rapport de force et du rapport de puissance, c’est-à-dire la capacité opérationnelle et le pouvoir de tirer le plus grand bénéfice de la puissance de feu possédée et de la force de dissuasion accumulée.

Dans l’exercice du rapport de force à distance, le Makhzen a par ailleurs recours à la partie religieuse de son soft power. A savoir l’organisation de l’influence spirituelle par la mobilisation des réseaux confrériques rattachés à la grande zaouïa tidjania pourtant née en Algérie, son berceau, et sa base d’extension vers le Maroc, via deux haltes transcendantales à l’ouest et au sud-ouest du pays, Ras El Ma et surtout Boussemghoune, terre des racines familiales et spirituelles de notre président de la République Abdelmadjid Tebboune.

Le centre intellectuel, culturel et historique de la Tidjania est certes Aïn Madhi où le ksar abrite également la zaouïa-mère de la confrérie qui conserve les tombeaux des principaux chefs de la famille Tidjania. Mais Boussemghoune, où Ahmed Tidjani vit le Prophète Sidna Mohammed en état de veille et où il résida pendant 13 ans, est le centre le plus important de la confrérie.

Malgré l’accaparement des racines de la Tidjania par la monarchie chérifienne, la confrérie trouve son origine algérienne vers 1781-1782, sous la régence turque, lorsque le cheikh Ahmed Tidjani, enfant de Aïn Madhi, dans la région de Laghouat, lors d’une retraite métaphysique dans une oasis proche de Boussemghoune, eut, à 46 ans, une singulière expérience mystique en rencontrant le Prophète Mohammed dans une vision éveillée.
Le Sceau des Prophètes lui promit alors d’être son intercesseur privilégié, et celui de ses fidèles, auprès de Dieu. Son ordre confrérique connaît ensuite une expansion importante sur l’Oranie, ce qui provoque l’inquiétude de la Régence d’Alger et il est contraint donc de se réfugier à Fès où il s’installe jusqu’à sa mort en 1815 sous la protection du sultan alaouite Slimane Ben Mohammed. Mais c’est à Fès que Sidi Ahmed Tidjani reçoit le statut de «Pôle caché» (al-qotb el khafi), ce qui, dans la hiérarchie mystique, en fait un intermédiaire privilégié entre le Prophète et le commun des mortels, et le place immédiatement juste en dessous des prophètes et de leurs compagnons promis au Paradis.

Le Prophète (QSSSL) l’aurait élevé au rang spirituel du sceau de la sainteté (khātam al-awliyā), lui conférant la connaissance exclusive du nom suprême de Dieu (ism Allāh al-A’dham) et le pouvoir d’un vice-roi (khalifa) qui seul peut assurer la médiation entre Dieu Tout-Puissant et ses fragiles créatures. En outre, et c’est là le second avantage essentiel lié à sa présence sur le sol marocain où il est enterré, son enseignement a été compilé par un de ses compagnons marocains du nom de Ali Harâzem Barrâda, dans Jawâhir al Ma’ânî (Perles des Significations).

La ville séculaire de Fès, où Ahmed Tidjani a vécu une partie de sa vie et où se trouve son mausolée, est le lieu de pèlerinage de la Tidjania le plus visité dans le monde surtout par les ressortissants des pays subsahariens et d’Afrique de l’Ouest.

Diffusée dans un premier temps autour de Boussemghoune, une oasis du Sud-Ouest algérien, la confrérie s’est répandue au Maghreb et, de façon limitée, en Arabie saoudite. Elle a surtout traversé le Sahara pour se diffuser au Sahel, en Afrique de l’Ouest où elle est aujourd’hui la confrérie la plus répandue, tout particulièrement au Sénégal où elle jouit d’une influence inégalée. Elle s’est implantée plus tard au Tchad, au Soudan, au Nigeria, en Indonésie et au Pakistan. Elle est également présente en Libye, en Égypte, en Syrie, en France et aux États-Unis où elle influencera notamment le mouvement Nation of Islam, l’organisation politico-religieuse américaine à l’origine de la plupart des organisations musulmanes de la communauté afro-américaine. La présence du mausolée de Sidi Ahmed Tidjani à Fès, le fait que son enseignement et sa doxa soient rassemblés par un disciple et compagnon marocain et que ce soit au Maroc même qu’il ait reçu le titre suprême de «pôle caché» spirituel qui lui confère le statut quasi divin d’intercesseur privilégié entre le Prophète et les adeptes de la confrérie sont les trois éléments sur lesquels le Makhzen a installé la légitimité de la paternité de la Tidjania en tant que legs spirituel.

L’héritage historique religieux ainsi préempté est devenu une arme efficace au service de la diplomatie, du renseignement et du commerce du Maroc en Afrique subsaharienne et de l’Ouest. Un moyen d’autant plus efficace et précieux que «l’ennemi» algérien, lui, a toujours eu toutes les peines du monde à valoriser à son propre profit un patrimoine spirituel dont les bases originelles se trouvent pourtant sur le sol algérien.

Avec cet ennemi algérien utile et indispensable qui détermine l’équation marocaine de recherche des équilibres stratégiques dans la région et des fondements de son ambition de puissance régionale avec une grande profondeur stratégique, on est en fait dans cette «anormalité» telle que définie par l’ancien ministre des Affaires étrangères algérien, Ramtane Lamamra.

Au cœur de cette «anormalité», deux pommes de discorde, le Sahara occidental et la frontière terrestre hermétiquement fermée. Sur le Sahara occidental, n’en déplaise toujours au voisin marocain, la position de l’Algérie est en parfaite harmonie avec la légitimité internationale.
En témoigne, entre autres résolutions, la décision de la Cour de justice de l’Union européenne qui rappelle que le Sahara occidental ne fait pas partie du Maroc, confirmant ainsi la position de l’ONU, celle de l’Union africaine et la position de principe de l’Algérie.

À ce sujet, les autorités algériennes successives ont souvent invité le Maroc à dissocier les problèmes bilatéraux de la question du Sahara occidental qui est de la responsabilité de l’ONU.

Le défi lancé aux autorités marocaines consiste donc à découpler la question du Sahara occidental du dossier du contentieux bilatéral comme ont pu le faire un certain temps le président Chadli Benjedid et le roi Hassan II qui ont su nouer le dialogue entre les deux pays entre 1988 et 1991.

Restent alors les 1 559 km de frontière qui constituent la plus longue frontière terrestre fermée au monde. Il ne s’agit certes pas d’une situation de forte intensité conflictuelle, comme entre les deux Corées par exemple. Mais cette frontière a fini par être érigée en véritable barrière, tout en revêtant une dimension de plus en plus militarisée.

Avec des enjeux politiques, économiques, territoriaux ou migratoires. Et un gigantesque paradoxe : le fait que les ressortissants des deux États peuvent circuler par d’autres moyens entre les deux pays tandis que localement, la séparation terrestre se renforce progressivement depuis la fermeture de la frontière en 1994, à l’initiative première du Maroc. Quoique bien fermée, cette ligne de démarcation n’est pas si étanche que ça ! Elle reste néanmoins ouverte aux échanges transfrontaliers irréguliers.

La limitation de circulation et les événements politiques entre les deux pays n’ont pas abouti en effet à l’assèchement économique total des échanges de part et d’autre, favorisés, il est vrai, par une certaine forme de mobilité pendulaire. L’axe est également emprunté par des migrants issus de l’Afrique subsaharienne. Pour sa part, le Maroc pratique ce que les spécialistes appellent une «teichopolitique», c’est-à-dire une politique de cloisonnement de l’espace et d’édification de barrières diverses.
Raisons officielles invoquées : la lutte contre l’immigration clandestine, la contrebande et la protection face au terrorisme. Arguments injustifiés, estiment les Algériens qui répondent par le creusement de tranchées à la construction de barrières murales par le Maroc.

Les conséquences géopolitiques et économiques de la fermeture de la frontière sont assez évidentes pour être rappelées ici même. Mais alors quel avenir pour cette frontière close ? De manière générale, son ouverture est pour l’instant plus un souhait ardent marocain qu’algérien. Le gouvernement chérifien déclare vouloir ouvrir la frontière, tout en construisant des murs le long de la frontière et prétend fallacieusement se heurter au refus des autorités algériennes.

Ces dernières sont pourtant catégoriques : elles n’ouvriront pas la frontière tant que les points en litige ne seront pas éclaircis à la faveur d’un dialogue serein et déconnecté du problème du Sahara occidental. Une évidence rappelée par Ramtane Lamamra comme on l’a déjà vu par la pertinente formule de ce dernier : «Les relations avec le Maroc sont anormales (…), même si les relations entre les deux peuples sont exemplaires.»

N. K.

*journaliste et conseiller du ministre de la communication, porte-parole du gouvernement

Le Soir d’Algérie, 31 mai 2020

Tags : Maroc, Algérie, Sahara Occidental,

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