Maroc, Mohammed VI, Sénégal, Karim Wade, haschich, Sahara Occidental,
Selon un câble de l’ambassade américaine à Rabat, révélé par le site Wikileaks daté du 6 septembre 2009, un fonctionnaire de police marocain a arrêté Karim Wade à l’aéroport de Casablanca, en possession de haschich. Le ministre d’Etat a été détenu pendant quelque temps avant d’être libéré sur ordre de Mohammed VI. Cette outrecuidance a valu à l’officier d’être muté au Sahara Occidental en guise de chatiment. Voici le texte intégral du câble diplomatique :
SUJET : INTERDICTION DES DROGUES AU MAROC : DEUX PAS EN AVANT, UN PAS EN ARRIERE
REF : RABAT 0486 (NOTAL)
Classé par : Charge d’Affaires, a.i.,
Robert P. Jackson pour les raisons 1.4 (b) et (d).
Résumé :
Depuis au moins le 14 août, date à laquelle, selon les médias marocains, la police a arrêté 16 barons de la drogue présumés dans le cadre d’une vaste opération menée dans tout le pays, la presse se fait régulièrement l’écho d’un aspect ou l’autre des efforts déployés par le gouvernement marocain pour désorganiser le commerce de la drogue et appréhender les personnes soupçonnées d’y participer. Qu’il s’agisse de rapports sur la confiscation et l’éradication de drogues ou de l’implication d’anciens ou d’actuels hauts fonctionnaires ou élus, les observateurs ont droit à une alimentation régulière en matière de drogue. A ce jour, entre 110 et 140 tonnes de cannabis ont été saisies, bien qu’une partie soit retournée dans les rues. Alors que le mois sacré du Ramadan est en cours, un Marocain a comparé cette opération à un exercice de “nettoyage” et de “feuilleton”, faisant remarquer que chaque année, pendant le Ramadan, il semble qu’un scandale quelconque se déroule dans les journaux. Parmi ceux-ci figure l’arrestation du ministre d’État sénégalais Karim Wade, fils du président sénégalais Abdoulaye Wade. Avec la drogue au centre de la scène cette année, la scène est prête pour les chuchotements hors caméra et les expédients politiques en coulisses. Fin du résumé.
Deux pas en avant
Citant une déclaration de la Direction générale de la sécurité nationale (DGSN), les médias marocains ont rapporté que le 14 août, la police a arrêté 16 barons de la drogue présumés lors d’une vaste opération menée dans plusieurs villes du pays. Les policiers ont saisi une grande quantité de drogues dures, ainsi que de faux documents, notamment des papiers d’identité et des permis de conduire. Ils ont également confisqué des véhicules et autres équipements. Une source policière a déclaré à un quotidien marocain que de nombreuses arrestations ont été effectuées dans les régions de Tétouan et de Nador, au nord du pays. La source a également déclaré que l’enquête devrait permettre d’obtenir de plus amples informations sur ce qu’elle a appelé l’une des plus importantes opérations de saisie de drogue au Maroc cette année.
Cette action fait suite à une opération majeure menée plus tôt cette année, au cours de laquelle la police marocaine a arrêté plus de 100 personnes, également à Nador. Parmi ces arrestations figuraient des policiers, des gendarmes, des marins et des soldats. La date du procès n’a pas été fixée, l’investigation continuant son cours. Le procureur général près le tribunal de Casablanca a déclaré le 25 août que la justice pénale s’applique à toutes les personnes dont l’implication dans le trafic de drogue est avérée, quels que soient leur titre ou leur fonction.
Et peut-être plus
Peut-être à l’image de l’affirmation selon laquelle personne n’échappe à la loi, les médias ont largement fait état, le 31 août, de l’arrestation de l’ancien député Mohammed Jouahi, considéré par certains comme l’un des plus grands et des plus puissants barons de la drogue. Jouahi était, et est peut-être encore, membre du parti centriste RNI; certains rapports indiquent que la direction du parti a rapidement affirmé qu’il n’en faisait plus partie. D’autres rapports faisant état d’une répression en cours indiquent que des arrestations très médiatisées ont impliqué un certain nombre d’agents de sécurité et d’avocats dans plusieurs régions du pays. Les journalistes ont émis l’hypothèse que la campagne actuelle de lutte contre le trafic de drogue dans le pays a été ordonnée par les plus hautes autorités.
Mais un pas en arrière
Si ce sont les plus hautes autorités qui dirigent la répression, elles peuvent également diriger les résultats de l’effort d’interdiction des drogues. Il a été signalé à la mi-août qu’un haut responsable de la police de l’aéroport de Casablanca avait été brusquement réaffecté à un poste sans responsabilités à Layounne, au Sahara occidental. Les raisons invoquées varient : un journal a déclaré que c’était parce qu’il avait arrêté un parent d’un dirigeant africain qui transportait de la drogue ; d’autres ont affirmé que c’était dû à une série d’erreurs professionnelles non précisées, peut-être même à un scandale sexuel. Les rapports des services de renseignement confirment qu’il s’agissait de la première raison et que le parent arrêté était le fils du président sénégalais Abdoulaye Wade. Le fils, le ministre d’État sénégalais chargé de la coopération internationale, de l’aménagement du territoire, du transport aérien et des infrastructures, Karim Wade, a apparemment été trouvé en possession de haschisch alors qu’il passait la sécurité de l’aéroport. Le roi Mohammed VI, dont Wade est un ami proche, n’aurait pas apprécié les actions des autorités locales qui ne l’ont pas informé de l’arrestation de Wade ; il a donc réaffecté deux fonctionnaires.
Commentaire
Alors que les rapports sur la répression du trafic de drogue au Maroc suggèrent que les autorités continuent de se concentrer sur le problème, leurs efforts ne sont pas à l’abri de la politisation.
Etant donné que l’arrestation du jeune Wade pourrait mettre en péril les relations entre le Maroc et le Sénégal, on peut comprendre la colère du Roi envers la police de l’aéroport de Casablanca. Le Post a rapporté l’impact potentiel de l’éradication de la drogue sur la participation des électeurs aux élections locales de juin ; ce dernier incident suggère que, malgré les appels continus du roi à la réforme judiciaire, l’arrestation pour délit criminel est, elle aussi, soumise à l’opportunisme politique. Fin du commentaire.
Jackson
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